Revues Revue RILEA #1 (2022) Épices et sortilèges. Contribution à une étude symbolique des épices dans les pratiques magiques à l’époque moderne (Aragon, Espagne – XVIIe-XVIIIe siècles)

Résumé

Tout objet du quotidien est susceptible d’entrer dans la composition d’un sortilège. Les épices ne font pas exception. En Espagne, elles étaient utilisées comme remèdes destinés à réduire les fractures ou faire tomber la fièvre. Les procédés d’élaboration frôlent bien souvent le comportement superstitieux. Leur étude systématique démontre que les guérisseurs ne méconnaissaient pas les propriétés curatives des épices. En outre, leurs qualités roboratives ou olfactives sont également mises à contribution dans la préparation de sortilèges pour attirer l’amour ou guérir une épouse éconduite.

Mots-clés : Épices, Magie curative, Magie amoureuse, Symbolisme

Abstract
Any everyday object can be used in the composition of a spell. Spices are no exception. In Spain, they were used as remedies to reduce fractures or to bring down fever. The procedures for their preparation often border on superstitious behaviour. Their systematic study shows that the healers were not unaware of the curative properties of spices. In addition, their roborative or olfactory qualities are also used in the preparation of spells to attract love or to cure a spurned wife.

Keywords: Spices, Healing Magic, Love Magic, Symbolism

Texte

Au cours de l’époque moderne, le terme « épice » est généralement appliqué à tout produit aromatique provenant des régions tropicales asiatiques, et notamment des Îles des Épices – les Moluques – conquises par le Portugais António de Abreu en 1512. En atteste, pour le domaine hispanique, l’édition du Diccionario de Autoridades de 1732, qui propose la définition suivante : « drogues destinées à assaisonner les viandes et à relever les plats telles que le clou de girofle, le poivre, la cannelle, le gingembre », en somme, des substances toutes issues de l’Orient (entrée « Especia »)[1].

Les chercheurs ont depuis investi la thématique des épices en privilégiant tout d’abord des approches historiques et économiques, qui portent essentiellement sur l’étude des routes commerciales terrestres et maritimes pour acheminer cette marchandise[2]. Certains spécialistes se sont également penchés sur trois aspects principaux des épices : leurs parfums, particulièrement utiles notamment lors de la momification dans l’Égypte ancienne ; leurs qualités gustatives et leur utilisation culinaire depuis l’Antiquité[3] ; et enfin, leurs vertus thérapeutiques ainsi que leur emploi dans la pharmacopée traditionnelle[4]. Parmi l’ensemble de ces analyses, une place particulière doit être faite aux travaux anthropologiques portant sur la mythologie et la symbologie[5], et plus particulièrement l’étude de la représentation mythique, imaginaire ou légendaire des épices au travers d’une pensée, d’un système, d’une culture, d’une religion ou d’une époque. Deux exemples suffisent à démontrer le caractère fécond de cette approche : dans son ouvrage Le jardin d’Adonis, Marcel Détienne esquisse une mythologie des aromates de la Grèce ancienne ; quant à Jean-Pierre Albert, dans Odeurs de sainteté, il revient sur leur signification à partir de textes sacrés du Moyen Âge[6].

En dépit de ces avancées fondamentales, deux constats s’imposent : d’une part, si l’Antiquité et le Moyen Âge ont fait l’objet d’enquêtes particulièrement détaillées, l’époque moderne n’a été que très peu abordée ; d’autre part, si les épices ont été envisagées sous différents angles, aucune étude ne s’est appliquée à analyser de façon spécifique leur emploi au sein des pratiques magiques[7]. L’hypothèse traditionnelle qui est avancée pour expliquer ces lacunes est la suivante : les personnes accusées de sorcellerie et de superstitions durant l’époque moderne, ou leurs clients, appartiennent dans leur très grande majorité au menu peuple, un secteur de la population qui ne dispose pas des moyens financiers suffisants pour se procurer cette denrée considérée comme un symbole d’opulence et un produit de luxe[8].

Ceci ne signifie pas pour autant que les épices soient totalement absentes des pratiques magiques. Au contraire, dans le cas de la péninsule ibérique, certaines d’entre elles sont présentes dans les sortilèges mis en œuvre par les sorciers et les superstitieux. Toutefois, il faut en réalité élargir le sémantisme et adopter l’acception la plus étendue du terme, c’est-à-dire concevoir l’épice non plus seulement comme une plante exotique et aromatique aux propriétés gustatives et olfactives, mais prendre en compte également toutes les plantes ainsi que les herbes, que l’on qualifiera d’épices indigènes ou domestiques, et issues de la culture et de la cueillette locales[9].

À partir de procès instruits par le Tribunal du Saint-Office de Saragosse entre la seconde moitié du XVIIe siècle et l’abolition de l’institution en 1820, nous nous proposons de suivre cette définition au sens large et d’analyser les valeurs symboliques et magiques des épices. Quelles sont celles utilisées par les accusés et sous quelle forme ? S’agit-il d’un usage propre à l’Aragon ou retrouvons-nous ces mêmes emplois dans d’autres régions ou à d’autres époques ? À partir de la pensée ésotérique des prévenus, et des analogies conscientes ou inconscientes qu’ils établissent, nous allons tenter de déterminer le pouvoir que les épices renferment et le rôle qu’elles occupent dans les sortilèges. D’ores et déjà, précisons qu’elles sont totalement absentes des pratiques sorcellaires[10] : le sel est bien mentionné dans les dépositions qui font état du sabbat des sorciers mais ce n’est que pour rappeler qu’il est interdit lors des conventicules nocturnes en l’honneur du diable ; il est en effet le plus puissant antidote contre les créatures infernales. Nos recherches ne nous ont pas non plus permis de relever l’utilisation d’épices en Aragon dans les opérations magiques destinées à nuire à autrui, tels que les maléfices et les mauvais sorts. En revanche, elles se révèlent être bien plus nombreuses dans deux domaines superstitieux fondamentaux : la magie curative d’une part ; les sortilèges amoureux et érotiques d’autre part.

Épices et magie curative

Les vertus thérapeutiques des épices sont connues depuis l’Antiquité comme en témoigne le De materia medica de Dioscoride au Ie siècle[11]. Présentes dans la médecine savante, les épices se retrouvent aussi dans les remèdes plus rudimentaires de la médecine populaire. En effet, leurs procédés plus ou moins élaborés frôlent bien souvent le comportement superstitieux et sont ainsi contraires à la religion. Afin de mettre en garde la population contre certaines de ces pratiques considérées comme hérétiques, les démonologues – ces théologiens spécialisés dans l’observation et la condamnation des artifices diaboliques – rappellent la conduite à suivre et proposent quelques exemples de médications naturelles lorsque les fidèles ne peuvent avoir accès aux services d’un médecin ou d’un apothicaire. Ainsi en 1538, dans sa Reprovación de las supersticiones y hechizerías, l’Aragonais Pedro Ciruelo en énumère quelques-unes destinées à soulager les morsures de chiens enragés ou les piqûres de scorpions. Parmi les remèdes proposés, quelques épices telles que les ails, les oignons, le persil, le fenouil ou encore différentes variétés de menthe[12]. Dûment écrasées et appliquées en cataplasmes, elles empêchent généralement le venin d’atteindre le cœur, ou permettent d’absorber et de retirer le poison de la plaie, selon la conception médicale de l’époque. Prenons l’exemple des ails :

Les ails écrasés et placés sur la morsure envenimée sont bénéfiques, et leur jus est tout aussi bénéfique si le patient le boit avec du vin, car il disperse le venin afin qu’il n’atteigne point le cœur.[13]

Si tout un chacun considère l’ail comme une puissante protection contre les vampires – peut-on voir ici un lien entre sa forte odeur et celle de la putréfaction des chairs, voire de la mort – il n’en reste pas moins qu’il a toujours fait partie de la pharmacopée et qu’il a sans cesse été réputé pour protéger contre les maladies infectieuses et contagieuses, et par extension, contre les maux et le Mal[14].

Malgré ces précautions, et bien que leurs méthodes se rapprochent de celles préconisées par les démonologues, de nombreux individus comparaissent devant le Tribunal inquisitorial pour avoir pratiqué des soins superstitieux à base d’épices dont le but est de guérir les troubles et les maladies les plus variés. En 1753, Antonio de la Carta est dénoncé, entre autres chefs d’accusation, pour avoir soigné les fièvres tierces et quartes de plusieurs habitants de Torrijo (à l’ouest du royaume). Le remède utilisé semble plutôt simple : il donne de petits sacs remplis de sel que les malades doivent coudre à leurs vêtements. La façon de les fabriquer semble toutefois suspecte aux yeux des patients au point qu’un ministre du tribunal se charge de s’en procurer et d’interroger les proches de l’accusé :

[…] quelques patients pris de scrupules, bien qu’ils prissent ledit remède, présumèrent que ce n’était point une bonne recette ; le commissaire parvint donc à saisir sept de ces petites bourses, et sut par une tante dudit accusé que ce dernier s’enfermait dans une pièce à l’écart des regards pour y lire un petit livre, et qu’il préparait alors lesdites petites bourses ; il enjoignait [les malades] de ne les point ouvrir et de les coudre à leurs vêtements, car si ouverture il y avait, le mal reviendrait. [15]

Un certain mystère entoure la préparation de ces amulettes, qu’il s’agisse de la lecture d’un grimoire nécessaire à leur confection ou de la ferme interdiction d’ouvrir ces petits sachets. D’ailleurs, la défense faite aux malades est un détail intéressant : le sel, symbole d’incorruptibilité depuis les temps anciens, ne peut se dégrader au contact de l’air. En revanche, il est possible d’avancer que l’ouverture de chacune de ces petites bourses pourrait laisser s’échapper le pouvoir de guérison qui a été conféré aux grains de sel par la formule nécessairement magique prononcée à l’aide du livre. En ce qui concerne les propriétés du condiment, nous pouvons rappeler qu’issu de l’évaporation de l’eau – un élément pur donc –, le sel possède par contamination des vertus purificatrices[16]. Selon le fondement – ou fonctionnement – ésotérique de l’amulette, celle-ci tire systématiquement son pouvoir des substances qui la composent en vertu du principe de sympathie[17]. Dans une tentative d’esquisser la pensée magique de l’individu, il est possible d’avancer que, du fait de la pureté attribuée au condiment et de ses propriétés déshydratantes, les cristaux de sel, concentrés à l’intérieur du morceau de tissu, qui est en contact avec le corps, devraient permettre l’absorption de l’humeur qui provoque l’hyperthermie. À l’inverse, du fait de ses vertus corrosives, le sel viendrait dissoudre en quelque sorte le mal qui ronge l’individu et ferait disparaître la fièvre, oscillant ainsi entre pouvoir destructeur et effet bénéfique. Bien que ce remède soit appliqué au XVIIIe siècle, il s’agit en réalité d’une tradition millénaire puisqu’en Perse, il était courant d’attacher ces petites bourses de sel au cou des jeunes enfants particulièrement vulnérables au mauvais œil. Il est vrai que celui que Plutarque appelle le « condiment des condiments » servait déjà chez les Grecs à conjurer les démons, et donc à écarter tous les actes maléfiques[18]. Cette propriété a traversé les siècles dans la mesure où de nos jours encore, en Aragon, et d’une manière générale dans toutes les Pyrénées et dans une grande partie de la péninsule ibérique, il est traditionnel d’entourer les nouveau-nés d’objets magiques tels que le sel afin de les protéger des esprits malfaisants. Cette magie dite prophylactique[19] est la technique principale que nous relevons dans les procès pour soins superstitieux à l’époque moderne.

Les infusions ou décoctions d’épices sont une autre forme privilégiée de remèdes par les accusés spécialisés dans la médecine empirique superstitieuse, comme en atteste le cas de Francisco Sánchez en 1653. Cela fait plus de vingt ans que ce dernier traite les personnes victimes de maléfices : outre les rituels qu’il pratique sur les morceaux de tissus ou les mèches de cheveux que lui font parvenir les malades, il conseille à ces derniers de boire tous les jours un mélange d’orge et de sucre ainsi qu’un bouillon préparé à base d’épices et d’herbes fraîchement cueillies le matin de la saint Jean[20]. La relation de cause de foi[21] ne livre aucun détail supplémentaire quant aux épices employées. Il est cependant possible d’avancer qu’il s’agit de plantes traditionnelles et locales dont la floraison a lieu, en particulier, à la fin du printemps ou au début de l’été telles que la sauge, le laurier ou encore l’ail. En effet, si ce remède peut sembler parfaitement naturel, la seule référence à la date du 24 juin trahit le comportement superstitieux de l’accusé. En dépit des efforts de l’Église pour effacer les éléments impies de la fête païenne de la saint Jean, la récolte des herbes qui sont censées disposer ce jour-là de vertus magiques et curatives décuplées subsiste. Selon Jean Marqués-Rivière, spécialiste des traditions talismaniques et pentaculaires, nous pouvons affirmer que :

Ces plantes sont la “traduction” chrétienne des herbes solsticiales que toute l’Antiquité a connues. Ce sont des plantes qui sont, au solstice d’été, dans le plus grand épanouissement. Pline en fait mention ainsi que Dioscorides. [22]

Pour Pline, ces « herbes solsticiales » sont entre autres l’armoise, la bardane, la camomille, le millepertuis, le lycopode ou le chiendent[23]. Au-delà du moment de l’année au cours duquel cette cueillette doit avoir lieu, en raison de la signification magique qu’elle renferme, et même s’il ne s’agit pas d’épices, toutes ces herbes exhalent un parfum et un arôme très intenses. Précisons en outre que leur utilisation sous forme de graines (pour la bardane), de poudre (pour le lycopode) ou d’huile (pour le millepertuis, nommé également « chasse diable »), puis macérées dans une eau bouillie, est très recherchée dans les pratiques occultes, que ce soit en Europe et même en Asie. Parmi ces « herbes de la saint Jean », une plante est classée parmi les épices, et dont l’utilisation magique est relativement fréquente dans les sortilèges aragonais : la verveine. Cependant, les magiciens préfèrent en extraire son jus ou l’employer comme emplâtre.

Le remède qu’administre Carlos de Federicis en 1690 est plus précis. À l’un des patients qui vient le consulter pour une blessure, il lui dit de boire durant vingt-quatre jours consécutifs un bouillon où sont mélangés du bois d’aloès (china[24]), du séné, de la salsepareille, du bois de santal, des raisins secs et de la cannelle[25]. Cette préparation offre un compendium de la pharmacopée orientale dans la mesure où la plupart de ces ingrédients sont originaires d’Asie. D’un point de vue purement thérapeutique, cette potion peut avoir un triple effet : elle apaise la douleur et fait baisser la fièvre grâce au santal et à l’aloès réduits en poudre ; elle est purgative de par l’action de la salsepareille et du séné ; enfin, la cannelle permet de tonifier et de stimuler l’organisme, en particulier si elle est cuite dans du vin, breuvage prescrit pour lutter contre la fièvre depuis le XIIe siècle. Interrogé par les inquisiteurs, le patient reconnaît avoir aussitôt recouvré la santé grâce à ce remède. Dans un registre magique et symbologique, l’aloès suspendu aux portes dans tout le bassin méditerranéen a le pouvoir d’éloigner les mauvais esprits ou de chasser les âmes en peine[26]. Aussi les amulettes fabriquées en bois de santal sont particulièrement puissantes et, grâce aux fortes exhalaisons de ses essences, le bois de santal permet d’activer les états de conscience supérieurs, à l’image de certaines plantes magiques telles que la mandragore, la belladone ou le datura, aux effets psychotropes considérables. En Orient, la cannelle est utilisée pour ces mêmes propriétés et plus particulièrement pour entrer en transe et communiquer avec les morts afin de lire l’avenir ; elle joue de plus un rôle de purificateur d’âme lorsqu’elle n’est pas employée à des fins amoureuses et érotiques[27]. Cependant, toutes ces vertus magiques semblent bien éloignées du traitement, même superstitieux, d’une simple blessure. En réalité, les plantes et les épices que Carlos de Federicis manipule ici ne le sont que pour leurs qualités thérapeutiques, et non ésotériques. D’ailleurs, cet accusé, qui est alchimiste de profession, connaît très certainement leurs vertus médicinales. Néanmoins, le seul fait d’évoquer ces ingrédients peut, d’une part, avoir un certain impact sur le patient qui n’est pas accoutumé à ces substances exotiques, et d’autre part, réussir à le convaincre de leurs bienfaits (réels ou imaginaires). Sans doute est-il utile de préciser que Carlos de Federicis fait figure de parfait imposteur parmi les personnes condamnées : grâce à ses talents de bonimenteur, il persuade ses proies de l’efficacité des sortilèges amoureux qu’il prétend connaître ou de ses capacités à pouvoir parcourir les océans grâce à une chaise volante ; il parvient même à entraîner avec lui une quinzaine de personnes pour l’aider à fabriquer de la fausse monnaie grâce à l’expérience de la pierre philosophale. Il n’est donc pas impossible qu’il ait pu faire croire à son patient que cette potion soit bien plus miraculeuse qu’elle ne l’est en réalité.

Près d’un demi-siècle plus tard, d’autres soins superstitieux à partir de décoctions d’épices sont relevés. En 1753, Gracia Miera reçoit la visite d’une femme qui souffre de règles abondantes. Le diagnostic posé par l’accusée est sans appel : cette affection provient des disputes répétées entre la plaignante et son époux. Le soin préconisé est simple : il suffit de faire bouillir quelques racines de mauves, accompagnées soit de petit salé, soit de persil ou de vinaigre, et d’en boire le jus chaque matin et chaque soir[28]. Selon Pythagore, la tige de mauve a des vertus thérapeutiques très étendues, qu’il s’agisse de prévenir les migraines ou de soulager les maux de ventre ou ceux de l’esprit[29]. Pline l’Ancien lui accordait même un pouvoir aphrodisiaque qu’il faut mettre en rapport avec la couleur des pétales de cette fleur ainsi qu’avec la pulpe rouge que l’on peut extraire de ses racines. C’est sans doute la complémentarité de ces deux propriétés qui rendront à la plaignante tant un cycle menstruel normal qu’une vie conjugale plus sereine. N’oublions pas que la mauve était très utilisée à l’époque moderne par les femmes esseulées pour les retours d’affection. En revanche, le seul aromate de ce remède a un pouvoir beaucoup plus ambigu : tant bénéfique que maléfique, le persil semble cependant avoir des effets bien plus nocifs sur les personnes de sexe féminin. Les Romains l’accusent d’ailleurs de rendre stérile et de tarir le lait des femmes allaitantes ; peut-être est-ce précisément pour cela qu’il est associé à la boisson, afin de faire cesser le flux menstruel, ou alors s’agit-il d’une réminiscence des vertus médicinales que lui attribuait Plutarque ? Selon ce dernier, le centaure Chiron avait enseigné à Achille les bienfaits du persil contre tous types de maux. Plusieurs siècles plus tard, au Moyen Âge, il était même d’usage de faire cuire cet aromate dans de l’eau bénite pour rendre la santé à une personne touchée par un maléfice[30].

Mais aux côtés des talismans et des infusions, certains superstitieux préfèrent utiliser les épices sous formes d’emplâtres, peut-être afin de favoriser le contact de ces ingrédients avec l’épiderme et espérer ainsi un effet plus rapide. Parmi le contingent des accusés, le montagnard Juan Puyol fait figure de véritable botaniste au regard du nombre de soins qu’il pratique et d’éléments naturels qu’il manipule. Par le truchement d’une formule magique, il découvre en 1684 que l’un de ses clients est ensorcelé. Pour le libérer du mauvais sort, il lui recommande tout d’abord un lavement avec un peu d’eau et de vinaigre puis il lui applique sur les poignets un cataplasme composé de cinq gousses d’ails, onze grains de poivre, quelques écorces de sureau et du vinaigre[31]. Si tout au long du Moyen Âge l’ail passe pour être la « thériaque des pauvres », l’agent prophylactique le plus largement employé lors des épisodes de pestes, depuis Homère, il est connu pour protéger des envoûtements, notamment ceux de Circée. Et pour Pline, il préserve de la folie. En ce sens, dès les temps anciens, l’ail apparait comme un puissant antidote qui repousse les influences néfastes ou les agressions dangereuses. Selon une croyance fortement ancrée depuis des siècles dans toute l’aire méditerranéenne et jusqu’en Inde, il permet de lutter contre le mauvais œil. Le poivre est lui aussi doté de propriétés curatives pour traiter les maladies nerveuses, les fièvres ou les migraines, en particulier lorsque l’on place sur le front un torchon imbibé d’eau-de-vie sur lequel quelques grains de cette épice sont déposés. Mais il accroît surtout la puissance du sortilège ou du breuvage auquel il est incorporé, sans doute en raison de sa saveur extrêmement piquante. Les vertus médicinales du sureau sont quant à elles connues depuis l’Égypte ancienne pour remédier par exemple aux états fébriles ; en Aragon, les emplâtres à base de sureau sont par ailleurs appliqués afin d’apaiser les chocs et les traumatismes. Dans un registre ésotérique, le bois de sureau aurait servi à fabriquer de puissantes baguettes magiques et chasserait toute malveillance[32]. Comme une ancienne tradition castillane l’atteste, les baies de sureau étaient jetées lors de la célébration des mariages puis brûlées, et les cendres étaient ensuite versées sur les époux afin de placer l’union sous les meilleurs auspices[33]. Au-delà des vertus thérapeutiques que peuvent renfermer tous ces éléments, il faut souligner ici l’alliance de multiples propriétés magiques, toutes plus puissantes les unes que les autres, qui semble faire de ce remède une panacée contre tous types de maléfices. Toutefois, deux précisions semblent encore nécessaires. Tout d’abord, les odeurs de soufre imprègnent généralement les actes de Satan et de ses sectateurs – ici, les accusés de sorcellerie et de superstitions – : il est alors possible d’imaginer que le mauvais sort est lui-même contaminé, à un stade imaginaire, par ces relents pestilentiels ; les émanations âcres de l’ail associé au poivre pourraient donc être une solution par imitation pour combattre le maléfice[34]. Ensuite, l’apposition du cataplasme sur les poignets correspond à un geste de magie que l’on pourrait qualifier de magie énergétique (le poignet étant utilisé de nos jours pour l’application des huiles essentielles), mais elle renvoie surtout aux techniques de guérison d’autrefois, et notamment aux épicarpes, l’epicarpium étant une préparation médicamenteuse placée autour du poignet d’une personne prise de fièvre[35]. À mi-chemin entre la médecine populaire et la superstition, le remède de Juan Puyol devrait alors être des plus efficaces, ce que l’individu ensorcelé confirme puisqu’il s’est senti en meilleure santé trois jours plus tard.

Ces procédés curatifs superstitieux, salutaires ou non, n’en excèdent pas moins les professionnels de la santé, qui perdent leur clientèle au profit de quelques rebouteux aux méthodes suspectes. Ainsi, en 1751, le chirurgien Miguel de Iriarte vient dénoncer Silvestre Añanos qui intervient auprès des malades lorsque les soins des praticiens officiels s’avèrent inopérants. Alors que Miguel de Iriarte vient d’effectuer une saignée sur l’un de ses patients souffrant d’une fracture et dont l’état ne s’améliore pas, Silvestre Añanos se présente et propose ses services. Outre les signes de croix qu’il exécute et les pater noster qu’il psalmodie, il utilise des clous de girofle, du safran et du cumin qu’il mélange à de la poix afin de constituer une pâte qu’il applique en cataplasme pour réduire une fracture (para reducir el hueso llamado mal de espineta). Considérées comme sacrées et faisant partie de rites de protection contre les maléfices, les vertus magiques de ces trois épices sont essentiellement liées à leurs propriétés olfactives et aux parfums enivrants qu’elles exhalent, puisqu’elles sont utilisées sous forme de fumigations purificatrices et envoûtantes au Moyen-Orient, en Asie ainsi que dans le sud de l’Europe. Pline soulignait déjà, outre ses vertus aphrodisiaques, les influences singulièrement soporifiques du safran[36]. En ce sens, les trois épices employées entreraient dans la composition d’une potion particulièrement odorante destinée à troubler les sens du patient, à le transporter dans un état second afin d’apaiser la douleur. Cependant, selon le plaignant Iriarte, en plus d’être contraire à l’art de la chirurgie, cet emplâtre ne peut être suffisant[37]. En effet, il peut sembler difficile de pouvoir remettre un os en place par l’intermédiaire de cette seule préparation. Toutefois, sur un plan plus pratique, il pourrait s’agir en quelque sorte d’anesthésier l’individu avant que le guérisseur ne le manipule. D’ailleurs, Silvestre Añanos se frictionne les mains avec de l’huile, puis il place la mixture sur l’os démis avant de le ramener à sa position initiale[38], là où les sorciers des régions méditerranéennes ont l’habitude de passer leurs avant-bras dans une infusion de safran avant de procéder à un soin[39]. Une fois encore, nous nous situons à la frontière entre médecine et superstitions où se mêlent à la fois techniques empiriques et symboliques mythique, ésotérique et religieuse.

Les vertus du cataplasme de Ramón de Villareal sont cependant moins complexes : en 1689, il doit répondre des cures superstitieuses qu’il a l’habitude de pratiquer. Ainsi, pour soigner une femme qui dit souffrir de la gorge et de la poitrine, il applique aux endroits douloureux des linges trempés dans un bouillon de vin blanc, de feuilles de laurier, de racines de persil ainsi que de romarin. Il se justifie devant les inquisiteurs en affirmant avoir appris ce remède auprès de l’apothicaire qui l’avait acheté lorsqu’il était captif à Alger[40]. Une fois de plus, les propriétés curatives de ces aromates, conjuguées aux qualités roboratives du vin ainsi qu’à la chaleur dégagée par la compresse, doivent soulager la patiente. Cependant, même si les ingrédients sont parfaitement naturels, au même titre que les précédents remèdes, le soin est considéré comme superstitieux et sacrilège dans la mesure où l’accusé incorpore à la préparation des morceaux de cierge, sans doute pour placer la malade sous la protection de Dieu, à l’instar de Silvestre Añanos qui récitait le Notre Père et le Je vous salue Marie.

C’est en effet ce qui justifie la comparution et la condamnation de ces quelques accusés : dès lors qu’un remède n’est plus seulement composé de substances naturelles, mais qu’il est agrémenté d’autres ingrédients à l’origine douteuse ou d’objets du culte catholique, qu’il est associé à une gestuelle ou à la prononciation d’incantations ou de prières issues de la liturgie, il est aussitôt suspecté d’être une pratique magique, et celui qui l’utilise, d’être un hérétique. Les inquisiteurs estiment que la combinaison des épices, des aromates ou des herbes à des éléments superstitieux constitue dès lors un acte symbolique capable de produire des effets extraordinaires ou merveilleux qui se situent au-delà des capacités de l’être humain, et dans le cas présent, de rendre la santé par des méthodes détournées, et ce contre la volonté de Dieu.

Selon nous, bien que taxés de magiques ou de superstitieux, les remèdes décrits ici s’appuient sur une connaissance plus ou moins consciente des vertus que possèdent les substances employées. Largement empiriques, les procédés curatifs des guérisseurs aragonais ne diffèrent que peu de ceux auxquels ont recours les professionnels de la santé de l’époque. Ils font appel à un savoir médical ancestral qui a été transmis, intégré et partagé à des degrés divers, même à ce niveau de la population. En ce sens, les épices présentes dans les soins superstitieux sont certes un instrument investi d’un pouvoir magique, mais elles participent avant tout pour les accusés d’un processus de guérison plus que d’un comportement superstitieux répréhensible.

Épices et magie amoureuse

Ainsi que le souligne Marcel Détienne : « Dans le monde grec, où leur usage s’impose dès la fin du VIIe siècle, les aromates remplissent une triple fonction : condimentaire, cultuelle, érotique.[41] »

En effet, les diverses propriétés des épices mises à profit dans les techniques thérapeutiques populaires et superstitieuses entrent dans les rituels des magiciennes aragonaises à des fins amoureuses. Les épices interviennent dans les sortilèges destinés à attirer à elles, ou auprès de leurs clientes, les hommes qui sont à la fois synonymes d’amour, de sexe mais aussi et surtout d’argent.

Isabel Françisca de Mota fait partie des entremetteuses de Saragosse qui compte une clientèle féminine particulièrement nombreuse. Lors de sa comparution en 1665, l’entremetteuse conseille aux femmes en mal d’affection une préparation qui consiste à embaumer leur demeure : pour cela, elle leur demande d’apporter de l’eau bénite de trois églises, une palme bénite, du romarin ainsi que de l’encens et un cierge qui a servi au Saint Sacrement. Une fois tous ces ingrédients réduits en cendres, elle en dispose aux quatre coins de la maison afin de représenter une croix. Les pièces choisies répondent toutefois selon nous à une symbolique particulière : le seuil de la pièce principale marque le début de la relation ; le centre de cette même salle sert à matérialiser un premier rapprochement entre les deux êtres ; l’alcôve renvoie bien sûr au contact charnel ; les cendres jetées derrière la porte d’entrée visent enfin à empêcher tout éloignement du premier homme qui franchira la maisonnée[42]. Cette pratique est largement imprégnée de sacralité et de religiosité. La palme bénite et le romarin, tous deux symboles cérémoniels de paix, rappellent les célébrations cultuelles de l’Antiquité, où le romarin remplaçait l’encens lors des mariages chez les Romains par exemple. De plus, ils renvoient aux rites du christianisme comme celui des Rameaux, lorsque Jésus entre triomphalement dans Jérusalem, accueilli par ses disciples, palmes à la main. Enfin, la référence à cette fête catholique, qui ouvre la Semaine Sainte, est remarquable puisqu’elle marque surtout la fin du Carême, période d’abstinence à la suite de laquelle les instincts concupiscents peuvent être avivés. Au-delà de cette symbolique sacrée, l’essentiel du sortilège repose sur les parfums, notamment celui du romarin. D’ailleurs, la symbologie de cette plante aromatique est presque entièrement bâtie autour de ses fragrances dont les propriétés protectrices sont constamment soulignées. À l’instar d’Horace[43], les Anciens louaient le romarin : son odeur persistante permettait selon eux de s’attirer la faveur des Dieux. Dans un registre ésotérique, son parfum est surtout réputé pour porter chance et éloigner le mauvais sort[44]. Au regard de ces vertus, il aurait alors le pouvoir, en magie amoureuse, de placer la relation sentimentale sous les meilleurs auspices. Le sortilège d’Isabel Françisca de Mota chercherait en effet à enivrer et à charmer un homme au moyen de l’arôme qui se dégage des cendres, et partant, à écarter toute déconvenue amoureuse. Les archives inquisitoriales foisonnent de causes où les accusés tentent de susciter magiquement, par les senteurs généralement délicates, les affinités humaines et affectives entre les sexes. En 1674, Ana Condón se dénonce spontanément au Saint-Office pour avoir confectionné de multiples sortilèges amoureux, parmi lesquels figure celui du romarin :

[…] María, une castillane, lui dit que pour être chanceuse auprès des hommes, il était bon de bénir sa demeure, à l’aide d’eau bénite de cinq églises, d’encens béni, de palmier béni, de romarin vert, et qu’après avoir brûlé le tout, il fallait encenser toute la maison ; et elle l’avait exécuté de cette façon huit ou dix fois, toujours un lundi car on lui avait dit que cela était plus bénéfique le lundi, et qu’elle n’avait pas noté plus d’effet que si elle n’avait rien fait.[45]

Nous noterons les quelques adaptations personnelles, dont en particulier la fumigation : outre le symbolisme du feu du rite purificateur qui brûle diverses substances aromatiques pour ainsi chasser les mauvaises influences, les braises et la fumée qui s’en échappe évoquent ici naturellement l’amour ardent. En ce sens, nous souscrivons aux propos de Marcel Détienne qui affirme que le parfum des aromates a le pouvoir d’attirer ou de rapprocher les êtres :

Transmutés en onguents, métamorphosés en parfums, [les aromates] possèdent néanmoins la même vertu que la myrrhe et l’encens brûlés en l’honneur des dieux. […] les aromates, réservés à des fins érotiques, permettent d’unir des êtres normalement disjoints, de les conjoindre par la puissance de leur parfum.[46]

Grâce à ces quelques éléments, il est alors possible de mettre en lumière l’existence, depuis l’Antiquité, d’étroites analogies entre la symbolique des épices, les pratiques magiques amoureuses dans lesquelles elles interviennent et les sens qu’elles sollicitent, en somme une symbologie magico-érotico-sensorielle des épices.

D’ailleurs, si grâce à leurs propriétés olfactives, les épices ou les aromates possèdent ce pouvoir d’inclination ou de sujétion amoureuse, leur emploi sous formes d’amulettes, autre technique très prisée des magiciennes dédiées aux affaires de cœur, peut sembler tout à fait naturel. En 1655, plusieurs témoins déposent plainte contre Elena Sánchez pour soins superstitieux, nécromancie et divination, ainsi que pour quelques sortilèges qu’elle prépare à la demande d’épouses soucieuses de rétablir la paix au sein de leur ménage. C’est précisément le cas d’une femme qui raconte avoir reçu de la main de l’accusée deux petits talismans, constitués chacun d’une tige de romarin et de boutons d’or et de soie : le plus petit doit être cousu au vêtement du mari, le plus grand doit être porté par la plaignante[47]. Tout au long du Moyen Âge ainsi qu’au cours de l’époque moderne, l’on prétendait que les branches de romarin dissimulées à l’intérieur des habits pouvaient rendre joyeux n’importe quel individu et devaient inspirer en lui la passion amoureuse, si ce n’est sexuelle, en partie grâce à leurs émanations[48]. Cependant, dans le cas présent, l’épouse se souvient de l’odeur nauséabonde dégagée par cette amulette : il n’est pas impossible que l’accusée l’ait faite macérer dans une potion dont elle détient le secret, à considérer les ingrédients qu’elle utilise plus volontiers, tels que les cadavres d’animaux ou les objets récupérés sur les fourches patibulaires par exemple. Au regard de la sympathie des odeurs et des sentiments relevés par Marcel Détienne, nous pourrions avancer ici que la pestilence matérialise en quelque sorte le désordre affectif qui règne au sein du couple et qui éloigne les conjoints. Seule l’union des deux tiges, figurant les époux[49], peut conjurer et annuler cette fétidité grâce aux exhalaisons du romarin, qui rendra le mari plus doux. Une fois réunis, ils devraient alors retrouver l’harmonie conjugale et le parfum suave du bonheur.

Parmi les sortilèges amoureux, perturber les sens par les odeurs est en effet l’un des procédés les plus fréquents, au même titre que le contact avec l’être convoité, geste magique essentiel dans le domaine de l’amour. La cause de Joseph Fronçín réunit ces deux principes. Ce musicien, accusé en 1668 de superstitions et de sodomie, aurait ensorcelé un homme avec lequel il a entretenu une relation charnelle. Il déclare que lorsque deux personnes saisissent chacune de la main gauche une branche de verveine sèche, elles finissent par s’éprendre l’une de l’autre[50]. En revanche, il se défend d’avoir employé cette méthode, puisque, dit-il, pour charmer son ami, il n’a usé que de son regard. Mais il s’agit d’une pratique dont il a entendu parler. Cette croyance est en effet fortement ancrée dans la pensée collective : nous la retrouvons ainsi dans Les admirables secrets d’Albert le Grand, le grimoire le plus répandu en Europe au Moyen Âge et à l’époque moderne, et qui est sans aucun doute la source des propos rapportés par Joseph Fronçín. Il est ainsi précisé : « Si on veut se faire aimer d’un homme ou d’une femme, on se frottera les mains avec du jus de verveine, et ensuite on touchera celui qu’on voudra amouracher ; ce secret a été souvent éprouvé »[51].

Ici, associée au toucher, la sève parfumée de la verveine concilie les amants, tandis que dans la superstition décrite par Joseph Fronçín, c’est la branche de la plante qui permet d’établir le lien entre les deux êtres. En dépit de cette différence d’utilisation, ce végétal possède donc une vertu attractive et amoureuse intrinsèque. D’ailleurs, selon les Secrets d’Albert le Grand, cette propriété est connue depuis l’Antiquité : à partir de l’influence que les planètes exerceraient sur les plantes, l’empereur Alexandre aurait déterminé quelques-unes d’entre elles. L’astre, qui est en lien avec la verveine, est à ce titre particulièrement symbolique et explicite :

La septième [herbe] est de Vénus, et on l’appelle Pisterion. Quelques-uns la nomment aussi Colombaire ou Verveine. […] Elle rend amoureux parce que son suc fait beaucoup de sperme. De plus si quelqu’un la porte sur soi, il sera fort vigoureux dans le coït, pourvu qu’il n’ait rien d’autre que cette herbe.[52]

La verveine apparaît donc comme une herbe singulièrement érotisée : ses tiges attirent ou relient les amants ; son parfum envoûte ceux avec lesquels elle entre en contact ; et le nectar que l’on peut en extraire est une représentation végétale de la liqueur séminale.

Cette dernière remarque nous amène à envisager les philtres d’amour. Précisons d’emblée que les épices occupent une place bien moins importante que les liquides génésiques au sein de cette cuisine magique. Néanmoins, parmi les quelques rares cas de breuvages ou de plats épicés relevés, ceux de Gerónima Torrellas en 1655 méritent une attention particulière. Selon les dires d’une plaignante, elle a brûlé un cœur de mouton auquel elle a ajouté des feuilles de laurier ainsi que quelques coques de noix afin qu’un homme revienne auprès de son épouse[53]. Toutefois, le laurier ne joue ici qu’un rôle secondaire : cette technique tient plus de la magie imitative que de la préparation d’un mets aphrodisiaque à base d’herbes aux vertus magiques. En effet, plus important que le laurier, le feu qui embrase le cœur de l’animal doit provoquer par imitation un effet similaire sur celui de l’amant. Lors de sa déclaration, l’accusée reconnaît avoir aidé une autre femme à cuisiner cette fois-ci un lapin pour qu’un homme qu’elle convoite ne lui résiste pas. Pour ce faire, Gerónima Torrellas incorpore au plat des lézards qu’elle a préalablement salés et poivrés[54]. Ici encore, poivre et sel n’ont qu’une fonction gustative et non symbolique ou magique : ils ne serviraient qu’à assaisonner le ragoût et à masquer le goût de la chair de ces petits reptiles.

En réalité, les épices perdent tout pouvoir magique dès lors qu’elles entrent dans des préparations culinaires et qu’elles sont ingérées[55], bien qu’elles restent paradoxalement associées au goût, celui du désir, dans les autres sortilèges amoureux. En atteste le sel, l’épice la plus employée par les magiciennes dédiées aux affaires de cœur, et notamment dans la méthode augurale la plus répandue en Espagne à l’époque moderne : le sortilège des fèves. Ces dernières sont déposées au creux de la main, aux côtés d’autres ingrédients, puis jetées sur une table ou un morceau de tissu pour connaître la teneur des sentiments de l’être désiré ou pour déterminer si une rencontre affective se produira prochainement. Lors de sa comparution en 1656, Martina Coscullano évoque avec détails cette pratique :

[…] en une autre occasion, ladite femme apporta à l’accusée dix-huit fèves, neuf mâles et neuf femelles, mais aussi, un peu de tissu bleu, un morceau de cire de couleur, un autre morceau d’alun, du sel, un morceau de plâtre, une demie-fève, une piécette, puis elle indiqua à l’accusée que le tissu bleu symbolisait la jalousie, la cire la paix, l’alun le malheur, le sel le goût, le plâtre la maison, la demie-fève le lit, la piécette l’argent, puis désignant une fève pour chaque personne qui devait intervenir dans le sortilège (pour l’homme, une fève mâle, et pour la femme, celle qui correspond à son sexe), et les déposant dans sa main gauche, elle les signa trois fois de la main droite, tout en disant : au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, et elle continuait ainsi : fève, je vous conjure par saint Pierre, par saint Paul, par le Christ sur la Croix, par sainte Marie, par les Apôtres de Rome, par la Sainte Trinité, fèves, dîtes-moi l’avenir et la vérité sur ce que je viens vous quémander. Puis elle demandait ce qu’elle souhaitait savoir, et mélangeant les fèves entre ses mains, en prenant soin auparavant de faire trois croix à l’endroit où elle devait les jeter, elle les jetait et observait la façon dont tombaient les fèves à proximité ou non des autres ingrédients utilisés. Et cette accusée avait fait ce sortilège d’innombrables fois au cours des trois dernières années ; quelquefois elles révélaient l’avenir, parfois non. [56]

Ce sortilège repose sur trois principes essentiels. Chaque élément possède, par association symbolique, une signification précise qui permet de matérialiser les émotions et de reproduire en miniature le foyer imaginaire des deux futurs amants. Les fèves personnifient quant à elles les sujets censés évoluer dans ce simulacre de relation amoureuse et la sexualisation de ces graines, dont la moitié est masculine et l’autre féminine, participe de la théâtralisation du devenir affectif de la cliente. La position des ingrédients une fois jetés détermine enfin le comportement des deux personnes mises en scène. Parmi tous ces instruments, le sel est bien l’unique condiment à apparaître[57] : pour la magicienne, il représente ici aussi le goût dans sa saveur métaphorique que pourra avoir la relation entre les deux êtres si celle-ci doit avoir lieu.

Conclusion

Au terme de cette analyse, nous constatons que les épices ne sont pas absentes des rituels magiques aragonais, même si elles font bien moins partie du laboratoire des sorciers et des superstitieux que les objets du culte catholique, les minéraux ou les substances provenant du monde humain et animal comme nous le relevons sans cesse dans notre corpus. De plus, ce sont plus généralement des épices domestiques qui entrent dans la composition de ces superstitions : outre le coût des épices déjà évoqué, les superstitieux ont tendance à recourir à tout objet issu de la vie quotidienne ou de l’environnement traditionnel, d’où cet emploi privilégié pour les ingrédients indigènes. Il faut même souligner qu’au sein de la définition très large retenue dans cette étude, ce sont même les plantes et herbes aromatiques, plus que les épices telles qu’elles sont entendues à l’époque moderne, que nous retrouvons dans les pratiques magiques. Deux autres caractéristiques générales doivent être formulées. D’une part, les épices apparaissent comme un élément antithétique aux effets maléfiques puisqu’elles sont invariablement employées à des fins bénéfiques, sans jamais provoquer le moindre dommage à la personne traitée ou envoûtée. D’autre part, elles sont très peu employées sous leur forme simple : leurs qualités, et même leur symbolique, s’active dès lors qu’elles sont associées à d’autres éléments.

Au sein des pratiques magiques, les soins superstitieux reposent en réalité sur les vertus médicinales et thérapeutiques des épices dévoilées par les Anciens, confirmant une fois de plus le transfert d’un savoir ancestral qui a traversé les siècles jusqu’à l’époque moderne, et bien au-delà. Alors que l’utilisation de ces ingrédients au sein des pratiques de magie curative s’avère bien plus pragmatique, voire prosaïque, les sortilèges amoureux exacerbent en revanche le symbolisme des épices qui relève lui aussi d’une tradition millénaire, mais qui n’est pas dépourvu d’interprétations connues que des seules magiciennes qui en usent.

NOTES

[1]Qualquiera de las drogas con que se sazonan las viandas, y se da sabor y gusto a los guisados, quales son clavo, pimienta, canela, gengibre, azafrán, etc. Úsase comúnmente en plural [https://apps2.rae.es/DA.html]. Le cas de la cannelle est particulier dans le sens où sa culture était déjà développée dans le sud de la péninsule ibérique, notamment en Andalousie. Signalons qu’en 1755, l’Encyclopédie de Diderot retient cette même définition : « On donne ce nom en général à toutes les drogues orientales et aromatiques, telles que le gérofle, le poivre, le gingembre, etc. dont nos Épiciers font le commerce », Denis DIDEROT, Jean D’ALEMBERT, Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des Arts, des Sciences et des Métiers, vol. V, Paris : Briasson, 1755, entrée « Épices », p. 776.

[2] Dans le cadre de nos recherches, nous notons qu’aucune étude ne porte sur la présence et le commerce des épices en Aragon. Seule l’enquête menée par l’historien Máximo Diago Hernando démontre le rôle non négligeable joué par le royaume aragonais dans l’importation des épices et l’approvisionnement du reste de la péninsule. Bien qu’acheminées depuis les ports méditerranéens jusqu’aux côtes catalanes, elles sont également introduites directement par voie terrestre en Aragon et transitent par plusieurs villes, devenues d’importants centres de redistribution tels que Saragosse, Calatayud et Tarazona, ce qui prouve l’influence de l’Aragon, dès le bas Moyen Âge, dans le commerce péninsulaire des épices, « El comercio de productos alimentarios entre las coronas de Castilla y Aragón en los siglos XIV y XV », Anuario de Estudios Medievales, n°31/2, Madrid : CSIC, 2001, p. 637-638 en particulier. Citons également l’influence du petit bourg de Jaca dès le XIe siècle, qui voit la création, sur la place de la cathédrale, pour la tenue du marché quotidien, d’un emplacement exclusivement réservé aux épices venues d’Orient, José Luis CORRAL LAFUENTE, « Los orígenes del sistema económico del reino de Aragón », Historia de Aragón II. Economía y sociedad, Zaragoza: Institución Fernando el Católico, 1996, p. 71 et 91).

[3] Voir en particulier Bruno LAURIOUX, « De l’usage des épices dans l’alimentation médiévale », Médiévales, n°5, Saint-Denis, PUV, 1983, p. 15-31. Dans le domaine hispanique, Expiración García Sánchez a étudié la présence des épices dans les pratiques culinaires andalouses : « La consommation des épices et des plantes aromatiques en Al-Andalus », Médiévales, n°33, Saint-Denis, PUV, 1997, p. 41-53, et « Especias y condimentos en la sociedad andalusí : prácticas culinarias y aplicaciones dietéticas », El sabor del sabor : hierbas aromáticas, condimentos y especias, Córdoba, Universidad de Córdoba, 2004, p. 71-96.

[4] Nous consulterons avec profit l’étude collective Herbes, drogues et épices en Méditerranée. Histoire, anthropologie, économie du Moyen Âge à nos jours, Actes de la Table ronde de l’Institut de Recherches Méditerranéennes, Paris : CNRS, 1988, 186 p., ainsi que l’article d’André FABRE, « Utilisation des textes de l’Antiquité à la recherche thérapeutique : l’exemple des épices médicinales », Revue d’Histoire de la Pharmacie, n°338, 2003, p. 239-250, et celui de Jean BARBAUD, « Les formulaires médicaux du Moyen Âge. Médecines savantes et médecines populaires », Revue d’Histoire de la Pharmacie, n°277, 1988, p. 138-153.

[5] Pierre Riffard donne la définition suivante de la symbologie : « Science, théorie des symboles » (Voir Nouveau dictionnaire de l’ésotérisme, Paris : Payot, 2008, entrée « Symbologie »).

[6] Marcel DÉTIENNE, Le jardin d’Adonis. La mythologie des aromates en Grèce, Paris : Gallimard, 1972. Jean-Pierre ALBERT, Odeurs de sainteté. La mythologie chrétienne des aromates, Paris : EHESS, 1990. Le lecteur pourra également consulter avec profit l’excellente synthèse de Pierre DELAVEAU, Les épices. Histoire, description et usage des différents épices, aromates et condiments, Paris : Albin Michel, 1987.

[7] Aucun travail scientifique ne porte spécifiquement sur la magie et les épices en Espagne ou en Amérique latine. À ce titre, dans les Indes occidentales, ce thème n’est pas abordé dans les deux plus importantes études de la sorcellerie et des superstitions en Amérique latine durant l’époque coloniale (Mexique et Brésil) : voir Solange ALBERRO, Inquisición y sociedad en México, 1571-1700, México : FCE, 1993 (1988) et Laura DE MELLO E SOUZA, El diablo en la tierra de Santa Cruz. Hechicería y religiosidad popular en el Brasil colonial, Madrid: Alianza Editorial, 1993.

[8] Jean-Pierre Albert met déjà en avant cette hypothèse en ce qui concerne l’utilisation médicale des aromates : « La place qui leur [aux aromates exotiques] est faite varie en effet selon les types de documents, et ces documents mêmes ne renseignent que très indirectement sur les pratiques médicales effectives. Le volume des aromates qui parvenaient en Occident ayant été soumis à de fortes fluctuations, il y a lieu de penser que beaucoup de recettes, héritées pour la plupart de l’Antiquité, pouvaient à certaines époques figurer dans les textes, et rester inappliquées quand leurs ingrédients faisaient défaut. L’hypothèse d’une pharmacie purement théorique n’est pas à exclure, et il est certain qu’une infime minorité seulement avait accès aux produits les plus rares et les plus prestigieux » (nous soulignons, ci-après n.s.) (Jean-Pierre ALBERT, Odeurs de sainteté. La mythologie chrétienne des aromates, op. cit., p. 102).

[9] Jusqu’à présent, les historiens, folkloristes et anthropologues ont privilégié l’étude de ce que nous pourrions appeler une « flore » ou « botanique » magique où les plantes – ou les simples – en général, plus que les seules épices, ont retenu leur attention (Jean-Michel SALLMANN, dir., Dictionnaire historique de la magie et des sciences occultes, Paris : Livre de Poche, 2006, entrée « Plantes », p. 565). Pour le domaine hispanique, nous renvoyons à la synthèse la plus importante sur le sujet : José Ramón GÓMEZ FERNÁNDEZ, Las plantas en la brujería medieval (Propiedades y creencias), Madrid : Celeste Ediciones, 1999, 152 p.

[10] Dans ce travail, nous allons opposer la sorcellerie, ou pratiques sorcellaires, à la magie / superstition. La sorcellerie est l’acte d’invoquer Satan dans un but strictement maléfique (pacte diabolique explicite). En revanche, magie et superstition sont bien souvent plus bénéfiques que maléfiques et l’invocation de Satan y est considérée comme inconsciente (pacte diabolique implicite).

[11] Jean BARBAUD, « Les formulaires médicaux du Moyen Âge. Médecines savantes et médecines populaires », art. cité, p. 139-140.

[12] Pedro CIRUELO, Reprovación de las supersticiones y hechizerías (1538), Salamanca: Diputación de Salamanca, 2003, p. 138-142.

[13]Los ajos majados y puestos sobre la mordedura ponçoñosa aprovechan bien y, aun si beviese el paciente el çumo dellos con vino, le hará provecho, porque derrama la ponçoña que no vaya al coraçón”. Nous traduisons l’ensemble des citations espagnoles et nous respectons la graphie des éditions ou des archives. Pedro CIRUELO, Reprovación de las supersticiones y hechizerías (1538), Salamanca: Diputación de Salamanca, 2003, p. 139.

[14] Éloïse MOZZANI, Le livre des superstitions. Mythes, croyances et légendes, Paris : Robert Laffont, 1995, entrée « Ail », p. 32.

[15] Archivo Histórico Nacional, Section Inquisición, Legajo (Liasse) 3735, expediente (dossier) 403 (ci-après A.H.N., Inq., Leg. 3735, exp. 403), fol. 1 r : “[…] que algunos sujetos escrupulosos, aunque tomaron dicha receta, sospecharon no era cosa buena, por lo que este comisario recogió asta 7 bolsillos, y supo por una tía del mismo reo que éste se ponía en un quarto retirado a leer en un libro no mui grande, y entonces hacía dichos bolsillos ; que encargaba no los avriessen y los colgasen cosidos al vestido, y que si los avrían volvería el mal”.

[16] Jean CHEVALIER, Alain GHEERBRANT, Dictionnaire des symboles, Paris : Robert Laffont, 1982 (1969), entrée « Sel », p. 858 et Éloïse MOZZANI, Le livre des superstitions, op. cit., entrée « Sel (Salière) », p. 1612. Rappelons que le sel est un élément qui intervient dans la liturgie baptismale, dont on se sert pour bénir l’eau du baptême.

[17] Le principe de sympathie implique que le semblable appelle le semblable ou que l’effet ressemble à sa cause. Jean SERVIER, dir., Dictionnaire de l’ésotérisme, Paris : PUF, 2013 (1998), entrée « Amulette » : « En ce qui concerne les objets-amulettes, une variété infinie servait à préserver contre maladies et dangers, […] comme certains métaux, pierres, plantes, ou objets d’origine animale, tiraient leur pouvoir protecteur de leur substance propre », des substances connues à travers les traités publiés tels que les Lapidaires, les Bestiaires, les Herbaires. Voir également Magali BAILLOT, Magie et sortilèges dans l’Antiquité romaine, Paris : Hermann Éditeurs, 2010, p. 61 : « Certaines substances minérales ou animales, elles, servaient à la confection d’amulettes et de remèdes. Les papyrus magiques en préconisent l’emploi, livrant même les indications nécessaires à leur mode de collecte. Parmi ces prescriptions, beaucoup reposaient sur l’idée que le cosmos était un tout dont les parties étaient liées entre elles, et ce suivant un principe de “parenté”. Autrement dit, les vertus assignées aux amulettes étaient souvent liées à leur couleur, à leur forme, à leur parfum ou bien à leur origine… ». Sur les principes magiques, nous renvoyons à James George FRAZER, Le Rameau d’Or, vol. I, Paris : Robert Laffont, 1981 (1935), p. 113 : « [Le] principe dominant [de la magie sympathique], est que le semblable appelle le semblable, ou, autrement dit, que l’effet ressemble à sa cause. L’autre branche de la magie sympathique, que nous avons appelée magie contagieuse, procède de l’idée suivante : les choses qui ont été une fois réunies, et sont ensuite séparées, restent néanmoins, malgré l’éloignement, unies par un lien de sympathie si puissant que tout ce qu’on fait à l’une affecte également l’autre ».

[18] Olivier de MARLIAVE, Magie et sorcellerie dans les Pyrénées, Bordeaux : Editions Sud-Ouest, 2006, entrée « Sel », p. 303. En Asie Mineure, les talismans permettant de lutter contre le mauvais œil sont confectionnés à partir de cumin noir, d’ail, d’alun et d’œillets. Jean MARQUÉS-RIVIÈRE, Amulettes, talismans et pentacles dans les traditions orientales et occidentales, Paris : Payot, 1972 (1938), p. 248. Les démonologues renaissants font référence aux différentes amulettes dont ils ont entendu parler comme celles qui protègent de la fièvre tierce : il suffit d’enfermer dans une petite bourse des insectes tels que des grillons, des sauterelles ou encore des araignées. Ces méthodes ne sont pas superstitieuses puisqu’elles sont données par les Anciens. Fray Martín de CASTAÑEGA, Tratado de las supersticiones y hechizerías y de la possibilidad y remedio dellas (1529), Logroño : Instituto de Estudios Riojanos, 1994, p. 36-37.

[19] La magie prophylactique est largement héritée des phylactères. La quatrième édition du Dictionnaire de l’Académie française donne la définition suivante : « On donnoit ce nom chez les Juifs à de petits morceaux de peau ou de parchemin, qu’ils attachoient à leurs bras ou à leur front, & sur lesquels étoient écrits différens passages de l’Écriture. Chez les Païens, le mot Phylactère signifioit, Toute espèce de préservatif ou de talisman porté superstitieusement par les Anciens ». Dictionnaire de l’Académie française, Tome 2, Paris : Veuve de Bernard Brunet, 1762, entrée « Phylactère », p. 366. Les phylactères, parfois appelés reliques ou pentacles, étaient portés sur soi depuis l’Antiquité pour se préserver de quelques malheurs.

[20] A.H.N., Inq., Lib. 995, fol. 19 v : “y haçía dar a los enfermos agua de cebada y açúcar, y caldo con espeçias, y los haçía comer con yerbas de la mañana de san Juan”.

[21] Les recherches inquisitoriales espagnoles reposent essentiellement sur les relations de causes de foi. Il s’agit de comptes rendus des affaires jugées à partir de 1540, envoyés annuellement par les districts inquisitoriaux au Tribunal central de Madrid, afin d’attester du travail accompli par les inquisiteurs de chaque Tribunal. Auparavant limités à une liste de noms d’accusés, ces documents voient leur contenu s’enrichir pour former, à partir du XVIIe siècle, un résumé très détaillé du procès.

[22] Jean MARQUÉS-RIVIÈRE, Amulettes, talismans et pentacles dans les traditions orientales et occidentales, Paris : Payot, 1972 (1938), pp. 250-251.

[23] Ibid., p. 251.

[24] Le Diccionario de Autoridades de 1729 donne la définition suivante : « China. Planta, o raíz que se trahe de la China. Es mui semejante a la raíz del lirio, y notablemente aguda y mordaz. Cocida en agua provoca a sudór y deshace gomas y otros tumóres fríos o gálicos”. Real Academia de la Lengua, Diccionario de la lengua castellana, Tomo II, Madrid: Francisco del Hierro, p. 320.

[25] A.H.N., Inq., Lib. 998, fol. 355 r. : “que se ejercitava en aplicar algunos medicamentos naturales a diferentes personas […], fue testificado […] de haver aplicado a un hombre que haçía dos años que padecía llagas en las piernas un ungüento […], y después le hizo tomar una agua cozida con china, sena, zarzaparrilla, sándalos colorados, passas y canela, por tiempo de veinte y quatro días, con que mejoró del todo y se halló bueno, y que el reo curava de quartanas, males de pecho, quebraduras”.

[26] Au Mexique, on fait un lavement à base d’aloès aux femmes adultères ; l’examen des selles permet ensuite de déterminer si l’épouse a trompé ou nom son mari. Éloïse MOZZANI, Le livre des superstitions. op. cit., entrées « Aloès », p. 48.

[27] Voir Éloïse MOZZANI, Le livre des superstitions. op. cit., entrée « Santal (Bois de) », p. 1592, et Jean CHEVALIER, Alain GHEERBRANT, Dictionnaire des symboles. op. cit., entrée « Cannelle-Cannelier », p. 295-296. Dioscoride avait déjà découvert les vertus purgatives de l’aloès (ou encore appelé « bois d’aigle »). L’Allemande sainte Hildegarde préconisait aussi dès le XIIe siècle la décoction du vin et de la cannelle pour traiter la paralysie, la goutte et la fièvre.

[28] A.H.N., Inq., Leg. 3735, exp. 383, fol. 1 r. : “Doña Antonia Puig […] dijo que por enero del mismo año, padecía la declarante un flujo de sangre, y preguntándola esta reo ¿qué mal padecía? Luego que se le dijo, respondió la reo que eso procedía de las inquietudes que tenía con su marido, lo que dice la testigo era assí : que aviéndola ofrecido un remedio para que tuviesse paz, y aceptádolo la declarante, la dijo cociesse raízes de malvas con salvado, y bebiesse un vaso de esta agua por la mañana y otro por la tarde, y lo continuasse por algunos días […] Que asimismo pidió la reo que la declarante la embiasse una redoma con binagre, raýzes de peregil y malvas y ella pondría lo demás para hacer una agua que devería beber por las mañanas y tardes, estando su marido en casa y sin que ésse lo supiesse”.

[29] Éloïse MOZZANI, Le livre des superstitions. op. cit., entrée « Mauve », p. 1103. Précisons d’ailleurs quant aux affections proprement féminines que, selon une croyance du XVIe siècle, une femme devait uriner une fois par jour, et ce durant trois jours consécutifs, sur une mauve pour savoir si elle allait tomber enceinte. Si la plante pourrissait, ladite femme resterait inféconde à jamais.

[30] Éloïse MOZZANI, Le livre des superstitions. op. cit., entrée « Persil », p. 1367.

[31] A.H.N., Inq., Lib. 998, fols. 277 v.-278 r. : “y que a otro enfermo havía ydo este reo a visitar, y le havía dicho cierta oración, y dijo que por ella conocía que el enfermo estava hechizado, y que le curaría con el favor de Dios y de la Virgen, y para ello le havía ordenado un lavatorio con un poco de agua y vinagre, y que le havía aplicado a las muñecas, por tres o quatro vezes, unos emplastos que se componían de zinco granos de ajo, onze granos de pimienta, unas cortezas de sabuco, y vinagre, con los quales el dicho enfermo havía conocido mejoría, y que al tercero día le havía faltado la calentura”.

[32] La littérature fantasy a repris à son compte cet élément : dans la saga Harry Potter de J.K. Rowling, la baguette de sureau est la plus puissante jamais fabriquée.

[33] Éloïse MOZZANI, Le livre des superstitions. op. cit., entrées « Ail », p. 32, « Poivre », p. 1453, « Sureau », p. 1678, et Olivier de MARLIAVE Olivier de, Magie et sorcellerie dans les Pyrénées, op. cit., entrées « Ail », p. 32, « Sureau », p. 316. Notons que dans la médecine populaire arabe, les cataplasmes de poivre, d’oignons et de sel sont réputés pour lutter contre la calvitie.

[34] Jean-Pierre Albert revient sur le recours aux substances aromatiques pour lutter contre les odeurs fétides de certaines maladies telles que la peste : « Mais c’est surtout le parfum qui importe : au XVIIIe siècle, on écrira encore que “le baume est excellent pour se garantir de la peste”, et l’on prêtera des vertus analogues aux gingembre, cannelle, cardamome et bois d’aloès, cités à côté de plantes aromatiques européennes » (Jean-Pierre ALBERT, Odeurs de sainteté. La mythologie chrétienne des aromates, op. cit., p. 107). Précisons qu’en ce qui concerne les actes maléfiques, il est possible d’imaginer que le combat « olfactif » pourrait se situer uniquement au niveau d’émanations désagréables à l’image de celles dégagées par le diable et les potions préparées par les sorciers : les parfums désagréables contre la « puanteur » démoniaque.

[35] Abbé PREVOST, Manuel lexique, ou Dictionnaire portatif des mots françois dont la signification n’est pas familière à tout le monde, Paris : Jean-Jacques Tutot, 1788, p. 256, « Epicarpium : Terme grec de Médecine. C’est un médicament composé d’ingrédients vifs et pénétrans, qui s’applique, en forme d’emplâtre, ou de cataplasme, autour du poignet d’une personne attaquée de la fièvre, pour en arrêter les suites, ou pour prévenir son retour ».

[36] Pline l’Ancien, Histoire naturelle, Livre XXI, Paris : Durochet, 1848, § LXXXI : « Le safran ne se mêle ni au miel ni à aucune substance douce, mais il se mêle très bien au vin ou à l’eau ; il est très utile en médecine. On le garde dans des boites de corne. Appliqué avec de l’œuf, il dissipe toutes les inflammations, mais surtout celles des yeux ; il dissipe aussi les suffocations hystériques, les ulcérations de l’estomac, de la poitrine, des reins, du foie, du poumon et de la vessie ; il est particulièrement utile dans l’inflammation de ces parties, ainsi que dans la toux et la pleurésie. Il guérit les démangeaisons ; il est diurétique. Ceux qui auront bu préalablement du safran ne ressentiront pas la pesanteur de tête que cause le vin, et résisteront à l’ivresse. Une couronne de safran dissipe les fumées du vin. Le safran est soporatif ; il émeut doucement la tête ; il est aphrodisiaque. La fleur, réduite en liniment avec la terre cimoliée, s’applique sur l’érysipèle. Le safran entre dans la composition de plusieurs médicaments ». [http://remacle.org/bloodwolf/erudits/plineancien/livre21.htm].

[37] A.H.N., Inq. Leg. 3735, exp. 402, fol. 3 r. : “El cirujano del lugar, Miguel de Iriarte, de 52 años, declara que aunque no ha visto curar al reo ni a su muger, save que después de aver el declarante hecho sangrías y demás medicamentos de su arte, no aviendo alivio, entró el reo o su muger a hacer sus curas, con Padres Nuestros y cruces nombrando a la Santíssima Trinidad ; que el pegado que aplican en la voca del estómago, no componiéndose de otra cosa que de pez, clavillo, azafrán y comino, no es bastante, según arte de cirugía, para reducir el hueso llamado espineta a su lugar, que asimismo es natural padezcan calenturas los que tienen este mal. Selon les explications de l’accusé, le mal de espineta proviene de salir de su lugar un hueso, que está en la voca del estómago, y como el lugar de Ruesta es de tierra mui quebrada, y la gente travaja mucho, le dijo el saludador que podía aver allí más que en otras partes por la fuerza que hacía la gente” (fol. 4 v.).

[38] A.H.N., Inq. Leg. 3735, exp. 402, fols. 4 v.-5 r. : “que antes de ponerles el pegado, untaba este reo su mano con aceite, y poniéndolo sobre dicho hueso, lo apretaba un poco, para que trajasse a su puesto, y con la palma se acababa de curar”.

[39] Éloïse MOZZANI, Le livre des superstitions. op. cit., entrées « Cumin », p. 563, « Safran », p. 1564.

[40] A.H.N., Inq., Lib. 998, fol. 343 v. : “y a la pregunta de si presumía la causa de su prisión, dijo sería por lo que havía passado en la villa de Pedrola con una muger cassada, que no nombró, que dezía estar enferma de la garganta y el pecho, y el reo movido de piedad la dijo que la curaría, y para ello havía pedido un poco de vino blanco, unas ojas de laurel, y unas raýzes de perejil y un poco de romero y çera, y una cazuela en qué ponerlo a la lumbre, y cozido todo junto, la pusieran unos paños mojados en la garganta y en el pecho, por haverlo visto el reo usar en Argel al boticario que le compró y tubo cautivo”.

[41] Marcel DÉTIENNE, Le jardin d’Adonis. La mythologie des aromates en Grèce, Paris : Gallimard, 1972, p. 58.

[42] A.H.N., Inq., Lib. 997, fol. 526 r. : “que la rea dixo a las susodichas en dicha ocasión, era bueno adereçar la casa para que las vuscasen hombres, y pidió que le traxesen agua bendita de tres iglesias, romero, palma bendita, una vela de las que avían servido al Sanctíssimo Sacramento y incienso, y que el romero y palma bendita se avía de poner devajo del incienso, y quemarlo con la vela encendida, y que la rea lo quemó, y puso en quatro partes de la casa de manera que viniesen a estar en cruz dichas cosas, y detrás de la puerta de la sala, y del aposento en que dormían, y detrás del portal, y en medio de la misma sala”. Nous pourrions dire également qu’à un stade purement métaphorique, l’ensemble du sortilège permet à la superstitieuse de figurer l’entrée dans un nouvel état : celui qui permet de passer du célibat à la relation amoureuse.

[43] Horace rend ainsi hommage à cette plante sacrée : « Si tu veux gagner l’estime des dieux, porte-leur des couronnes de romarin » (Odes III.23).

[44] Éloïse MOZZANI, Le livre des superstitions. op. cit., entrées « Palmier », p. 1329, « Romarin », p. 1535, et Jean CHEVALIER, Alain GHEERBRANT, Dictionnaire des symboles. op. cit., entrée « Palme », p. 724.

[45] A.H.N., Inq., Leg. 1808, exp. 12, n°7, fols. 4 v.-5 r. : “[…] que María, una castellana, la dijo que era bueno para tener ventura con los hombres, bendeçía la casa, que se haçía con agua bendita de çinco iglesias, inçienso bendito, palma bendita, y romero verde, y quemado todo junto, zahumar toda la casa, y que en esta forma lo avía ésta ejecutado ocho o diez vezes, siempre en lunes porque la dixeron que era mexor en lunes, y que no avía conoçido más efecto que si no lo hubiera hecho”. Précisons seulement pour terminer sur ce cas que, selon Ana Condón, le procédé doit être exécuté le lundi, un jour pourtant particulièrement néfaste, ainsi qu’elle finit par le constater puisqu’aucun homme ne s’est présenté chez elle.

[46] Nous soulignons. Marcel DÉTIENNE, Le jardin d’Adonis. La mythologie des aromates en Grèce, Paris : Gallimard, 1972, p. 92.

[47] A.H.N., Inq., Lib. 995, fols. 286 r.-v. : “y que en una ocasión, dio la rea a una persona dos cositas como dos vellotas pequeñas, que eran dos palitos como de romero, y a la mitad como un botón de oro de seda, […] y tenían mui mal olor, y le dixo que le pusiese el más pequeño a su marido en los vestidos, y que ella trugese consigo el mayor, que con eso tendrían paz”.

[48] Voir Éloïse MOZZANI, Le livre des superstitions. op. cit., entrée « Romarin », p. 1535.

[49] Comme dans de nombreuses superstitions amoureuses, la réunion de deux objets identiques symbolise la naissance ou renaissance des sentiments.

[50] A.H.N., Inq., Leg. 1808, exp. 12, n°2, fol. 22 r. : “y que otra persona le avía dicho que, para conciliar amistades, era bueno tomar la yerba berbena seca en la mano izquierda, y travar la misma con la de otra persona, pero que lo refería sólo por referido, y no por executarlo”.

[51] Claude SEIGNOLLE, Les Évangiles du diable, suivi de Le Grand et le Petit Albert, édition de Claude Seignolle, Paris : Robert Laffont, 1998, p. 754.

[52] Ibid, p. 754.

[53] A.H.N., Inq., Lib. 998, fol. 282 v. : “y que para que un hombre bolviese hablar a una muger, quemó un coraçón de carnero con ojas de laurel y cascas de nueçes”.

[54] A.H.N., Inq., Lib. 998, fol. 284 v. : “y que la dicha Justa Ramírez dixo que abía de haçer un pastel con un conexo para ir a çenar aquella noche con el dicho Martín Sanz, y preguntó a la rea y a otras personas que abía presentes, si sería bueno hechar en él las dichas sargantanas, para que comiendo dél el dicho Martín Sanz, la tubiese voluntad, y que la rea dixo que lo que era mal no le podían haçer, y que así las hechase si quería, y que la rea dijo a Jusepa Pérez, compañera suia, que friese las sargantanas en aceite mientras ella quitaba la pelleta al conejo, y que la rea hiço la masa para el pastel, y picó las sargantanas con sal y pimienta, y que la dicha Justa Ramírez hiço el pastel y la rea lo llebó a coçer al orno”.

[55] Dit autrement : les épices ne semblent détenir un pouvoir magique que lorsqu’elles ne sont pas ingérées.

[56] A.H.N., Inq., Lib. 995, fols. 421 r.-v. : “[…] y que en otra ocasión, dicha muger llebó a esta rea diez y ocho habas, nuebe machos y las nuebe embras, y con ellas y entre ellas un poquito de tafetán açul, otro de cera colorada, y otro de alún, otro de sal, otro de argez, media haba, un dinerillo, y la enseñó a esta rea que el tafetán açul significaba çelos, la cera la paz, el alun el pesar, la sal el gusto, el argez la casa, la media haba la cama, el dinerillo el dinero, y que señalando una haba por cada persona de las que abían de interbenir en las suertes, por el barón haba macho, y por hembra la que corresponde, y que poniéndolas en la mano izquierda, hiçiese tres cruçes con la derecha sobre ellas, diciendo : en el nombre del Padre, de el Hijo, y de el Espiritusanto ; y proseguía diçiendo : habas, yo os conjuro por San Pedro, por San Pablo, por Christo crucificado, por Santa María Colona, por los Apóstoles de Roma, por la Santísima Trinidad, habas que me digáis suerte y verdad desto que os e preguntado, y que se les preguntase lo que se quería saber, y bolviéndolas entre las manos, haçiendo primero tres cruçes sobre la parte que se habían de hechar, las arojase y viese cómo salían las habas çerca de las cosas referidas, y que esta rea hechó dichas habas innumerables veçes en el discurso de tres años, y unas veçes le salían çiertas las cosas que señalaban, y otras no”. Selon le Diccionario de Autoridades, le mot argez est attesté dans l’édition de 1933 et est la graphie ancienne de algez qui désigne le plâtre (« El yeso en piedra »).

[57] La fève utilisée ici est la vicia faba, la plante potagère. Seule la fève de Tonka peut être considérée comme une épice.

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Auteurs

Nicolas DIOCHON, Université Lumière Lyon 2, LARHRA – UMR 5190

n.diochon @ univ-lyon2.fr

Références

Pour citer cet article :

Nicolas DIOCHON - "Épices et sortilèges. Contribution à une étude symbolique des épices dans les pratiques magiques à l’époque moderne (Aragon, Espagne – XVIIe-XVIIIe siècles)" RILEA | 2022, mis en ligne le 24/05/2022. URL : https://anlea.org/revues_rilea/epices-et-sortileges-contribution-a-une-etude-symbolique-des-epices-dans-les-pratiques-magiques-a-lepoque-moderne-aragon-espagne-xviie-xviiie-siecles/