Revues Revue RILEA #4 (2025) Myriam RENAUDOT et Vanessa BOULLET, Valeur ajoutée de la civilisation en LEA : regards croisés

Résumé

Cet article propose une réflexion croisée sur la valeur ajoutée de l’enseignement de la civilisation au sein de la filière Langues Étrangères Appliquées (LEA), en s’appuyant sur une comparaison entre deux aires linguistiques et culturelles : anglophone et germanophone. Afin de mettre en lumière l’apport spécifique de cette discipline en LEA, une étude empirique a été conduite à partir de l’analyse de la maquette de la licence LEA parcours Anglais-Allemand de l’Université de Lorraine, site de Nancy. Cette démarche a été complétée par une enquête menée auprès des étudiants de Master ainsi que de jeunes diplômés aujourd’hui insérés dans le monde professionnel, notamment à l’international. En croisant les regards des enseignantes-chercheuses avec ceux des étudiants en cours de formation de Master et des jeunes professionnels, cette double approche permet de montrer que la civilisation, loin d’être un simple complément culturel, permet de développer des compétences analytiques, interculturelles et comparatistes, directement mobilisables dans la vie professionnelle des diplômés en LEA.

Mots-clés : LEA, civilisation, études anglophones, études germaniques

Abstract

This paper explores the added value of teaching civilisation in the Applied Foreign Languages (LEA) programme, based on comparing two linguistic and cultural areas: English studies and German studies. To shed light on the specific contributions of this discipline in LEA, two studies were carried out: the first one involved an analysis of the syllabus of the English-German LEA degree course at the University of Lorraine in Nancy. The second study consisted in a survey among current LEA Master’s students and recent and older postgraduates, some of whom are now working abroad. By combining the lecturers’ views with those of current students and young professionals, this dual approach reveals that civilisation, far from being a mere cultural course, enables students to develop analytical, intercultural, and comparative skills that are directly useful in the professional lives of LEA graduates.

Keywords: Applied Foreign Languages, civilisation, English studies, German studies

Texte

Introduction

L’appel à communications lancé en 2023 par les collègues des Universités de Caen et de Rouen dans le cadre d’une journée d’étude intitulée « Quelle place pour l’enseignement de la civilisation dans la filière LEA ? » organisée à l’Université de Rouen a été l’occasion de s’interroger sur les enjeux et la plus-value de l’enseignement de la civilisation dans la filière des Langues Etrangères Appliquées (LEA), une formation universitaire professionnalisante et résolument tournée vers l’international.

La civilisation a déjà fait l’objet de nombreuses recherches en France, tant sur le plan de sa définition et de ses contours disciplinaires[1], que de ses spécificités par rapport aux autres sciences humaines et sociales[2], ou encore de son enseignement auprès de divers publics étudiants[3] ou de son évolution[4]. Ces recherches se concentrent essentiellement sur une aire culturelle et linguistique particulière : on parlera de la civilisation dans les études anglophones, dans les études germaniques, ou encore dans les études hispanophones[5]. Les approches comparatistes sont plus rares et relèvent soit du cadre plus traditionnel des études franco-allemandes[6], soit d’une même aire culturelle et linguistique : la civilisation germanophone dans les études germaniques en France et dans les German studies aux Etats-Unis[7].

Comme de nombreux collègues de la 11e et 12e section du Conseil National des Universités ont déjà tenté de définir la civilisation, l’usage de ce terme ne sera pas débattu ici[8], même si son utilisation est remise en question par certains chercheurs qui vont jusqu’à expliquer « pourquoi le mot ‘civilisation’ ne convient plus en langues étrangères »[9]. Bien que les limites et les tensions que cristallise ce terme soient connues, notamment dans un contexte international où il s’agit de se définir par rapport aux homologues anglais, américains ou allemands, le choix a été fait de le conserver, non seulement parce qu’il demeure celui utilisé dans la maquette de la Licence LEA de Nancy, mais aussi parce que c’est un terme désormais institutionnalisé dans le contexte universitaire français et « inclusif »[10] : il permet aux chercheurs d’orientation politique, historique, économique, philosophique, etc. de s’y reconnaître. Ainsi, la définition retenue est celle qu’en donne le germaniste civilisationniste Stephan Martens :

La démarche décrite en France sous le nom de civilisation consiste à analyser la réalité d’une aire linguistique donnée, de [sic] l’expliquer et de [sic] la comprendre en usant d’une méthodologie pluridisciplinaire, fondée pour l’essentiel sur l’approche pratiquée par les sciences humaines et sociales. La spécialité du civilisationniste est justement sa pluridisciplinarité et sa logique de transversalité, qui, combinées à un rapport particulier à la langue, produisent un regard unique sur l’aire d’étude.[11]

L’originalité de l’approche de cet article réside dans les regards croisés portés sur la civilisation dans la filière LEA à travers deux aires linguistiques et culturelles : cette perspective comparative entre la civilisation anglophone et la civilisation germanophone constitue le fil conducteur de la démarche. Elle permet de décentrer la réflexion sur la civilisation et de la mettre en résonance avec l’ADN même de la formation LEA, intrinsèquement multilingue et multiculturelle, voire même de tendre vers la civilisation comparée. Au regard croisé « anglais-allemand » sur l’enseignement de la civilisation en LEA s’ajoute le point de vue d’étudiants et anciens étudiants[12] sur cet enseignement et son utilité dans la vie professionnelle, qui vient compléter et nuancer la réflexion. L’analyse d’un questionnaire adressé à d’anciens étudiants de Licence et Master LEA Anglais-Allemand de Nancy portant sur la civilisation permet de croiser la vue « d’en haut », celle d’enseignantes-chercheuses, avec une vue « par le bas », ancrée dans les expériences concrètes de celles et ceux qui ont suivi ces enseignements et qui ont réalisé des stages ou ont intégré le monde professionnel.

Pour montrer la valeur ajoutée de la civilisation en filière LEA, l’analyse s’attachera, dans un premier temps, à retracer l’évolution de cette discipline dans les études anglophones et germaniques ainsi qu’à examiner les perspectives offertes par les évolutions récentes. Puis, l’étude se concentrera sur un cas empirique : la civilisation telle qu’elle est enseignée en Licence LEA parcours Anglais-Allemand de l’Université de Lorraine, site de Nancy, par des enseignantes-chercheuses de civilisation irlandaise à orientation socio-économique et de civilisation allemande à orientation politico-historique. Enfin, les résultats de l’enquête menée auprès d’étudiants et anciens étudiants seront étudiés de manière à analyser la place de la civilisation dans la filière LEA à l’aune des expériences et perceptions de jeunes diplômés en Licence ou Master LEA, en train d’entrer ou entrés dans le monde du travail à l’international. Même si l’étude de cas se limite pour les besoins de l’article à l’exemple de l’Université de Lorraine, site de Nancy et si l’échantillon d’anciens étudiants ne constitue pas un groupe représentatif, l’analyse qualitative permet néanmoins de dégager des tendances significatives sur l’apport de la civilisation en LEA.

La civilisation dans les études de langues étrangères : état des lieux et perspectives

Pour appréhender pleinement la place actuelle de la civilisation dans les études de langues étrangères, et tout particulièrement en LEA, il est essentiel d’en retracer l’histoire, et d’en éclairer les soubassements disciplinaires. Une analyse comparée des traditions dans les études anglophones et germaniques françaises permet de mettre en évidence des temporalités et des approches sensiblement distinctes, façonnées par des contextes historiques, culturels et institutionnels propres.

Une tradition ancienne dans les études germaniques françaises

Dans le champ des études germaniques, ce sont les pères fondateurs de la germanistique française eux-mêmes qui sont considérés comme les premiers spécialistes de civilisation germanophone au début du XXe siècle. La thèse d’État de Charles Andler portant sur les origines du socialisme d’État en Allemagne, soutenue en 1897, est caractérisée par les germanistes de première thèse française de civilisation allemande[13]. La « civilisation allemande » est intégrée au programme de l’agrégation dès 1900, ce qui montre sa reconnaissance comme champ disciplinaire.

Figures majeures de l’entre-deux-guerres, Henri Lichtenberger et Edmond Vermeil, autres pères fondateurs de la germanistique française, poursuivent cette orientation. C’est l’expérience de la Première Guerre mondiale qui a poussé Henri Lichtenberger à s’orienter vers la civilisation et les relations actives avec l’Allemagne d’après-guerre[14]. Quant à Edmond Vermeil, élève de Charles Andler, il a consacré l’essentiel de ses travaux à la vie politique allemande[15]. L’orientation de la germanistique française vers l’étude de la civilisation s’explique donc par le contexte historique et politique de l’époque, entre fascination et méfiance envers l’Allemagne[16]. La civilisation se constitue alors comme « une science appliquée à usage politique »[17]. L’activité du germaniste était ainsi pensée comme médiation entre les deux pays : il était nécessaire de connaître l’Autre-ennemi, au moment des conflits armés entre les deux pays, mais aussi l’Autre-ami, permettant une réconciliation après la Seconde Guerre mondiale.

Enfin, dans le sillage des bouleversements intellectuels des années 1960, le germaniste Pierre Bertaux a contribué à établir la civilisation comme troisième pilier de la germanistique française à côté de la littérature et de la linguistique. À partir de 1967, il affirme la nécessité d’une approche de la civilisation orientée vers les réalités contemporaines, avec une volonté d’approfondissement de l’actualité allemande sociale, politique et économique, approche qui devait faciliter le regard vers l’avenir[18].

Une émergence plus tardive dans les études anglophones

Du côté des études anglophones, la reconnaissance de la civilisation comme champ d’étude est plus tardive et se fait au travers d’un dialogue avec d’autres disciplines.

Pour l’angliciste Gilles Leydier, qui a dirigé en 2004 un ouvrage collectif consacré à la civilisation qui fait référence, sont considérées comme pionnières en civilisation anglophone des œuvres écrites dans les années 1920-1930 par des spécialistes « extérieurs aux ‘études anglaises’ »[19], à savoir Elie Halévy, spécialiste de philosophie politique, André Philip, dans le domaine de l’histoire sociale, ainsi qu’André Siegfried en science politique[20].

Mais, selon Leydier, il faut attendre la fin des années 1960 et le travail pionnier de Monica Charlot pour voir s’affirmer une véritable « renaissance » de la civilisation au sein des études anglophones[21]. Sa thèse d’État, soutenue en 1971, traitant des élections législatives britanniques de 1930 à 1970, est considérée comme « la première thèse de civilisation britannique à proprement parler »[22]. Elle y propose une analyse des pratiques politiques et électorales britanniques, ouvrant ainsi la voie à une approche contextualisée de la culture politique britannique. Ainsi, sa thèse a joué un rôle déterminant dans l’institutionnalisation des études de civilisation britannique en France, tant au niveau de la recherche, que des enseignements et jusque dans les concours[23] : en 1977, elle obtient la création d’une option civilisation à l’agrégation[24].

La reconnaissance universitaire de la civilisation américaine suit une chronologie comparable. Si dès 1918, l’angliciste Charles Cestre occupe une chaire de littérature et de civilisation américaines à la Sorbonne ou si le littéraire Bernard Faÿ obtient la chaire de civilisation américaine au Collège de France en 1933, c’est avant tout en tant que littéraires, fondateurs des études américaines en France, qu’ils sont identifiés[25]. Ce n’est véritablement qu’à partir de 1967, avec la création de la première chaire d’histoire des États-Unis à la Sorbonne que la civilisation américaine fait son apparition dans les départements d’études anglophones[26], à une époque où les clivages issus de la guerre froide culturelle entre historiens pro-américains et historiens antiaméricains commençaient à s’estomper[27]. Dès cette période, deux groupes entrèrent en concurrence professionnelle sur la production du savoir sur les États-Unis en France : les historiens d’un côté, les anglicistes civilisationnistes de l’autre[28]. Cette concurrence s’exprime encore aujourd’hui dans les débats sur ce qu’est la civilisation[29].

Ainsi, la civilisation dans les études germaniques s’appuie sur une longue tradition qui lui est propre, liée au contexte des affrontements militaires entre la France et l’Allemagne de la fin du XIXe siècle et de la première moitié du XXe siècle, tandis que le développement de la civilisation dans les études anglophones est plus tardif et influencé par des spécialistes d’autres disciplines.

Civilisation et naissance de la filière LEA : convergences historiques

Mais dans les deux aires linguistiques, c’est à partir des années 1970 que la civilisation prend son essor dans les formations universitaires françaises[30]. Après l’émergence d’une recherche en civilisation, c’est l’enseignement de la civilisation dans les filières de langues étrangères qui se développe tout particulièrement. L’angliciste Gilles Leydier, tout comme le germaniste Ulrich Pfeil, considère cet engouement pour la civilisation comme une conséquence du choc culturel de Mai 1968, de l’enthousiasme pour le décloisonnement disciplinaire et la pluridisciplinarité, et des réformes universitaires qui en ont résulté[31]. D’autres, comme les historiennes et civilisationnistes anglicistes Nathalie Caron et Caroline Rolland-Diamond, évoquent plutôt l’influence de l’historien Fernand Braudel pour expliquer qu’à la fin des années 1960, « le terme ‘civilisation’ se soit émancipé de la littérature pour désigner strictement les enseignements qui ne relevaient ni de l’analyse littéraire ni de l’acquisition d’outils pour la maîtrise de la langue (grammaire – aujourd’hui linguistique et phonologie – et traduction), mais qui permettaient un approfondissement de la connaissance de l’environnement dans laquelle s’inscrivaient la langue et les œuvres littéraires étudiées »[32].

Dans cette dynamique, la création des filières LEA dans les années 1970-1980 marque une étape décisive. En effet, la formation sous le nom de LEA apparaît en 1972 à Paris X-Nanterre, elle est institutionnalisée par le décret du 1er mars 1973 puis l’arrêté du 7 juillet 1977[33]. Dès 1974, une demi-douzaine d’universités avait créé des parcours LEA comme les universités de Besançon, Avignon, Lyon 3, Rennes 2, Nice, Paris 3, etc.[34]. Ces filières LEA précurseures offrent à la civilisation un espace d’expérimentation et d’innovation. Gilles Leydier, dans une formule évocatrice, compare les civilisationnistes de l’époque au Tiers-État de 1789 : longtemps ignorés face aux littéraires et aux linguistes, ils ont ensuite été portés par le vent de l’histoire dans les années 1970-1980, à un moment où l’on s’enthousiasme pour les questions en prise avec le monde contemporain[35].

L’évolution de la civilisation dans les études de langues étrangères est en effet très liée à la création de la filière LEA tournée vers l’international et les besoins du monde de l’entreprise : à l’histoire politique et culturelle viennent s’ajouter des thématiques nouvelles comme l’analyse démographique, le rôle des organisations patronales et syndicales, l’organisation de l’entreprise, la place des minorités sociales et culturelles, les échanges économiques, les institutions internationales, etc, qui élargissent grandement le spectre disciplinaire[36]. L’angliciste Daniel Toudic caractérise ces nouveaux enseignements de civilisation d’ « audace révolutionnaire dans le monde conservateur des études universitaires de langues »[37]. Ces nouvelles tendances ont pu engendrer une « crispation relative entre civilisationnistes ‘historiens’, ‘politologues’ ou ‘économistes’ et les germanistes littéraires », souligne Stephan Martens[38]. Pendant quelques années, l’enseignement de la civilisation a même pu être considéré comme un domaine de prédilection de la formation en LEA, car en LEA, elle cessait d’être cantonnée à une « discipline d’appoint susceptible d’offrir un simple arrière-plan culturel aux analyses littéraires ou linguistiques »[39]. Et c’est aussi en LEA que la civilisation, si l’on reprend l’acceptation d’une civilisation tournée vers les questions contemporaines de Pierre Bertaux, pouvait pleinement s’épanouir.

Vers une recherche civilisationniste plus liée aux enjeux économiques

Les transformations de l’enseignement de la civilisation ont eu pour corollaire un renouvellement profond des thématiques de recherche en civilisation, favorisant l’émergence d’approches transversales, souvent situées à l’intersection de plusieurs disciplines, comme l’explique Stephan Martens : « Le civilisationniste en LEA est obligé d’insérer la problématique locale (le pays de langue allemande) dans un cadre régional plus large (l’Europe), ce dernier étant à son tour à intégrer au contexte mondial ». Pour le cas de l’Allemagne, il ne suffit pas de montrer qu’elle est une puissance commerciale, « il y a des enjeux géoéconomiques qu’on ne peut pas omettre d’expliquer et qui nécessitent par là des connaissances approfondies en économie internationale »[40]. Ainsi, avec l’analyse des dynamiques économiques, des enjeux géopolitiques ou des rapports de force commerciaux, les civilisationnistes ont développé des compétences en économie internationale ou en science politique.

L’institutionnalisation de ces recherches se manifeste également par la création de centres spécialisés, comme le CIRAC (Centre d’Information et de Recherche sur l’Allemagne Contemporaine) en 1982, centre dédié à l’étude des réalités économiques et sociales allemandes actuelles ou le CERVEPAS (Centre d’Etudes et de Recherches sur la Vie Economique des Pays Anglo-Saxons) en 1991. Ces structures témoignent de ce besoin croissant en matière de compétences économiques dans le champ de la recherche en civilisation, mais aussi d’une institutionnalisation de ces recherches[41].

Un champ en mutation : malaise de la civilisation et langue de spécialité

Malgré son enracinement disciplinaire et son apport reconnu pour la compréhension des sociétés contemporaines, l’enseignement de la civilisation traverse, depuis une vingtaine d’années, une période de remise en question, voire de fragilisation. Pierre Guerlain pointe un “malaise” croissant des civilisationnistes qui sont pris en étau entre les attentes toujours plus professionnalisantes des maquettes et la difficulté à faire reconnaître la spécificité de leur approche interdisciplinaire dans une formation pluridisciplinaire[42]. La civilisation est ainsi parfois reléguée à une fonction d’appoint ou d’apport culturel au service de compétences jugées prioritaires, telles que la maîtrise linguistique ou les savoir-faire opérationnels. Ce recentrage sur la langue et la communication, bien qu’il réponde aux attentes du monde socio-économique, tend à marginaliser les approches critiques, historiques ou analytiques, pourtant constitutives des études universitaires. La civilisation, dans son ambition de penser la complexité des sociétés, se heurte ainsi dans certaines universités à une baisse de son volume horaire, alors même que les enjeux géopolitiques, identitaires et environnementaux actuels rendent d’autant plus urgente une lecture contextualisée et critique de nos sociétés.

Un autre facteur de tension sur la civilisation est corrélé à l’augmentation des enseignements de langue de spécialité dans les formations LEA. Depuis les années 2000, les travaux du GERAS (Groupe d’Étude et de Recherche en Anglais de Spécialité) ont mis en lumière la langue de spécialité comme champ de recherche et d’enseignement à part entière[43]. Cette évolution a contribué à redessiner dans certaines universités les équilibres internes des formations LEA. Au lieu d’opposer langue de spécialité et civilisation comme deux enseignements distincts, il est nécessaire que les formations fassent dialoguer ces deux matières dans leur maquette car si la langue de spécialité permet de développer des compétences précieuses – telles que la terminologie professionnelle, la communication institutionnelle ou l’analyse de discours sectoriels -, la civilisation ne peut se réduire à un simple arrière-plan culturel des pratiques langagières professionnelles. La civilisation permet de donner les clés aux lecteurs en lui permettant de situer les discours spécialisés dans l’histoire des sociétés, de leurs valeurs, de leurs imaginaires et de leurs institutions.

Ces évolutions historiques et disciplinaires éclairent la manière dont la civilisation s’est consolidée comme un des piliers fondamentaux de la formation LEA. Toutefois, une tension subsiste aujourd’hui entre l’exigence académique de la civilisation et la vocation professionnalisante de la filière LEA[44]. L’analyse de l’enseignement de la civilisation en Licence LEA à Nancy montre que la civilisation peut être un levier de formation pour les étudiants en LEA car elle mobilise des compétences universitaires transférables, directement utiles aux futurs professionnels que sont les étudiants en LEA.

L’apport de la civilisation pour la formation LEA Anglais-Allemand de Nancy 

Les enseignements de civilisation

A la suite de l’appel à communications pour la journée d’étude à Rouen, une étude empirique a été engagée sur la formation LEA Anglais-Allemand à l’Université de Lorraine, site de Nancy.

Maquette

Une comparaison avec d’autres formations LEA montre qu’au cours des quinze dernières années les maquettes de ce cursus ont encore fait la part belle à la civilisation : à chaque nouvelle accréditation, l’intitulé « Civilisation » a été maintenu pour les cours de première et de deuxième année de Licence. Ainsi, les étudiants bénéficient de 12 heures de cours magistraux (CM) de « Civilisation anglophone » et 12 heures de CM de « Civilisation germanophone » pendant les quatre premiers semestres de leur Licence. En troisième année, cet enseignement prend la forme d’un cours intitulé « Contexte socio-économique » avec 24 heures de cours par langue au semestre cinq. Par ailleurs, bien que le cours intitulé « Médias et actualité » en L3 comporte également des aspects civilisationnels, il se distingue d’un cours de civilisation par sa concentration sur un domaine bien particulier (les médias). Ainsi, il a été décidé de ne pas inclure ce cours dans la catégorie des cours de civilisation. Il convient de noter que le semestre six est caractérisé par un départ en stage au milieu du semestre, qui se traduit par un semestre réduit et ne comprend donc pas de cours de civilisation.

Dans le Master LECSI (Langues étrangères et commerce et stratégie à l’international), aucun enseignement spécifique n’est dédié à la civilisation bien que des questions civilisationnelles soient traitées dans des cours comme « Monde culturel et actualité » ou « Relations interculturelles ». Cette situation s’explique notamment par le fait qu’en Master LEA, les étudiants manifestent un intérêt pour des contenus plus pointus, plus orientés vers leur insertion professionnelle avec davantage de cours en langue de spécialité. De plus, en comparaison de maquettes de Licence et Master LEA dans d’autres universités, les maquettes de LEA à Nancy donnent beaucoup d’importance aux matières d’application. Ainsi, au niveau master, ce sont principalement les sciences de gestion qui servent de support aux enseignements en langues étrangères.

Langue d’enseignement

La question de la langue d’enseignement de la civilisation, en français ou en langue étrangère, pour atteindre une des compétences attendues en civilisation, à savoir « Posséder une bonne connaissance et comprendre les faits de civilisation qui ont marqué l’évolution des pays des langues maîtrisées »[45] se pose régulièrement pour les équipes pédagogiques. A Nancy, le choix a été fait de dispenser l’enseignement de la civilisation en langue étrangère dès la première année de licence (L1) pour les langues non débutantes, et le plus rapidement possible (L2) pour les langues enseignées en niveau grand débutant. En L1, cela permet également aux étudiants de se rendre compte, dès les premières semaines, du niveau de langue à acquérir. En effet, les cours de traduction et de grammaire étant enseignés en langue française, l’immersion linguistique offerte par les cours de civilisation est indéniable pour les étudiants et complète les Travaux Pratiques de Langue (TPL) de communication, majoritairement enseignés par des locuteurs natifs (lecteurs et maîtres de langue) dès la L1 et les cours de langues de spécialité à partir de la L2. Les CM de civilisation en langue étrangère préparent également les étudiants au séjour Erasmus et à la prise de notes en langue étrangère.

Programme des cours de civilisation

L’un des reproches fréquemment adressés aux programmes de civilisation dans les filières LEA est leur manque de cohérence et de lisibilité, tant les contenus peuvent être variés et hétéroclites, rien qu’au sein d’une même langue. Ce « profil d’auberge espagnole ou de tour de Babel »[46] est encore accentué par l’apprentissage simultané de deux langues et de deux aires culturelles, faisant intervenir des enseignants d’horizons parfois très divers.

S’il est plus facile d’assurer une cohérence du programme en allemand par le fait qu’une seule enseignante-chercheuse en civilisation assure tous les cours contrairement à un nombre d’intervenants plus élevé en anglais, il n’en demeure pas moins qu’à Nancy, les programmes de civilisation suivent la même progression dans les deux langues au cours des deux premières années de Licence. Après une introduction à la civilisation avec l’étude de la géographie ou du système politique des pays étudiés, le programme devient plus historique et est conçu de manière chronologique, pour donner un cadre et plus de lisibilité. En anglais, la civilisation britannique et la civilisation américaine se répartissent entre semestres pairs et impairs.

Le programme doit également surmonter l’écueil du « catalogue à la Prévert »[47] grâce à la progression pédagogique ancrée dans la maquette même, avec le changement d’intitulé entre « Civilisation » en L1 et L2, et « Contexte socio-économique » en L3. Le passage par le contexte historique en première et deuxième années permet aux étudiants de bénéficier d’une « vision enrichie et problématisée de la réalité contemporaine »[48] dans les cours plus spécialisés de L3. Ainsi, les dynamiques sociales et économiques très actuelles pourront être appréhendées avec une plus grande acuité.

Apport de la recherche en civilisation pour l’enseignement

Dans le parcours Anglais-Allemand à Nancy, les cours de civilisation sont assurés, autant que les contraintes de service le permettent, par des enseignants-chercheurs ou des enseignants spécialisés en civilisation. L’apport de la recherche dans les cours de civilisation apparaît comme un point fort de la formation.

Contenu

Du point de vue du contenu, les cours de civilisation dispensés en LEA à Nancy sont nourris par les recherches des enseignants-chercheurs, qu’elles soient d’ordre historique, politique ou économique, et en particulier sur les XXe et XXIe siècles. Chaque enseignante-chercheuse ou enseignant-chercheur enrichit ainsi ses enseignements des perspectives issues de ses travaux.

Ainsi, en allemand, une recherche politico-historique portant sur l’Allemagne pendant la guerre froide, plus particulièrement sur la RDA, ainsi que sur la mémoire de la RDA dans l’Allemagne actuelle, alimente essentiellement le programme de civilisation de L2. Les travaux sur l’accueil d’étudiants étrangers en RDA permettent par exemple une compréhension plus nuancée du débat actuel sur l’immigration en Allemagne, lié au problème de main d’œuvre sur le marché du travail, thématiques traitées en « Contexte socio-économique ».

En anglais, les recherches portant sur les politiques économiques mises en œuvre par l’État irlandais pour développer le pays trouvent particulièrement leur place dans le cours de « Contexte socio-économique » de L3. L’économie irlandaise s’insère dans une économie mondiale avec d’une part les multinationales, majoritairement américaines et, d’autre part, les partenaires que sont le Royaume-Uni et l’Union Européenne. Les travaux de recherche portant sur les politiques économiques américaines, britanniques ou européennes contribuent à enrichir la connaissance de l’environnement socio-économique qu’acquièrent les étudiants. De plus, les résultats de telles recherches nourrissent aussi d’autres cours, comme celui de langue des affaires, en fournissant des documents authentiques et en renforçant la pertinence des contenus enseignés.

Ce trait d’union entre recherche et enseignement permet de former les étudiants de LEA au monde du travail en leur transmettant des savoirs ancrés dans les problématiques très contemporaines.

Démarche scientifique

Du point de vue méthodologique, les enseignements de civilisation par des enseignants-chercheurs en civilisation ont beaucoup à apporter à la formation universitaire des futurs cadres. La civilisation permet de créer une passerelle entre enseignement et recherche en encourageant les étudiants à mettre en pratique cette démarche scientifique à laquelle leurs enseignants cherchent également à les former, même si la finalité première des études en LEA n’est pas de former des chercheurs. Cette mise en contact avec des pratiques de recherche permet aux étudiants de développer leur autonomie, leur capacité de compréhension et de synthèse, ainsi que leur esprit critique. Ainsi, les étudiants ne sont pas uniquement passifs ou spectateurs de leur apprentissage.

Une familiarisation avec la démarche scientifique a lieu par exemple lorsque, dans le cadre des cours de civilisation, les étudiants ont à lire des articles scientifiques (dont ceux de leurs enseignants lorsque le sujet s’y prête) ou lorsqu’ils sont invités à participer à des journées d’étude et séminaires de recherche. Cela leur permet d’une part de compléter leurs cours qui ne peuvent pas fournir autant de détails qu’un article scientifique et de se rendre compte de l’actualité de la recherche. D’autre part, ils sont aussi sensibilisés à l’état de la recherche, à un travail qui s’appuie sur des sources précises et vérifiées, et à un discours analytique plus nuancé auquel ils sont moins habitués, car il est moins présent dans le discours journalistique. Par ailleurs, quand les étudiants ont à lire des articles scientifiques pour la préparation de présentations orales en « contexte socio-économique », ils développent plusieurs compétences : l’esprit d’analyse dans le cadre d’une recherche de problématique, ainsi que l’esprit de synthèse et l’esprit critique dans le fait de vérifier et croiser des sources sur une même thématique. Il s’agit d’autant de compétences universitaires qui sont directement utiles et recherchées par les entreprises[49].

Approche comparatiste et transversale

En civilisation, la comparaison est un processus d’analyse très utile car elle permet de mettre en évidence et d’explorer des spécificités allemandes, autrichiennes, britanniques, irlandaises, américaines, etc. Cette démarche de va-et-vient d’une aire culturelle et linguistique à l’autre, notamment de celle dont l’enseignant-chercheur est issu à celle dont il est expert grâce à ses recherches, est au cœur de la civilisation[50]. L’étudiant diplômé en LEA, fort de sa connaissance de deux aires linguistiques et culturelles étrangères, en plus de l’aire dont il est issu, peut être considéré comme un passeur de cultures.

Avoir une compréhension plus fine des différentes cultures est une véritable valeur ajoutée de l’étudiant en LEA. Ainsi, les étudiants en LEA peuvent être incités à avoir une démarche comparatiste, à établir des parallèles, des liens entre les enseignements de civilisation anglophone et de civilisation germanophone, à repérer les résonances thématiques, et à articuler leurs connaissances autour de problématiques transversales. Par exemple, dans le cadre du cours « Contexte socio-économique » dispensé à Nancy, les étudiants sont invités à comparer les thématiques étudiées en anglais et en allemand pour les aider à problématiser et à comprendre les enjeux spécifiques pour chaque aire culturelle. Un autre exemple de l’approche comparatiste concerne également les cours de langue de spécialité et de civilisation de L3. En Anglais des affaires, les étudiants ont travaillé sur les stratégies de croissance des entreprises en s’appuyant sur un article de The Economist consacré aux entreprises du Mittelstand, une spécificité allemande. Ce même texte a été repris dans le cours de « Contexte socio-économique – Allemand » complété par deux autres textes abordant le Mittelstand sous d’autres angles, l’un provenant d’une source allemande, l’autre d’une source française. Cet exercice a permis aux étudiants de mettre leurs connaissances en perspective, de mener une réflexion transversale et de mettre en pratique leurs compétences plurilingues.

Ainsi peuvent émerger des thèmes communs aux deux aires linguistiques plutôt que de laisser à l’étudiant le soin de faire lui-même la synthèse. Il n’en demeure pas moins que la collaboration étroite que nécessite une telle démarche n’est pas toujours simple à mettre en œuvre, tant les contraintes de coordination sont nombreuses au sein d’une équipe pédagogique pluridisciplinaire et plurilingue comme LEA, sans parler d’autres obstacles comme les affinités personnelles, les approches méthodologiques, les combinaisons de langues ou les contraintes d’emploi du temps.  Néanmoins, le développement d’une approche de civilisation comparée apparaît comme un enjeu majeur pour l’avenir de la filière LEA. Afin de vérifier la validité et le bien-fondé des principes pédagogiques précédemment énoncés, il a paru opportun d’interroger les étudiants et jeunes diplômés qui sont déjà sur le marché du travail et de croiser ainsi les regards portés sur la civilisation.

Le retour d’étudiants et de jeunes professionnels diplômés en LEA sur la civilisation

Les retours reçus spontanément au fil des années, tant de la part de tuteurs de stage que de la part d’anciens étudiants, ont mis en évidence la légitimité et la pertinence de l’enseignement de la civilisation tel qu’il était conçu et dispensé en LEA à Nancy, en lien avec la recherche. Ces témoignages épars mais récurrents ont été le point de départ d’une réflexion approfondie, menée à travers une enquête auprès d’anciens étudiants.

Remarques méthodologiques

Le questionnaire exploratoire était destiné à d’anciens étudiants de Licence LEA Anglais-Allemand de Nancy ayant eu au moins une expérience professionnelle en L3, en M1 et/ou en M2 afin de connaître leur perception de l’enseignement de la civilisation dans leur parcours, et d’en évaluer l’utilité dans leur vie professionnelle. Ce questionnaire a été diffusé auprès des étudiants de M1 et M2 en 2022-2023 ayant été inscrits au minimum en L3 dans la Licence LEA Anglais-Allemand de Nancy, ainsi qu’aux anciens diplômés du Master LEA de Nancy qui avaient effectué leur Licence à l’Université de Lorraine, contactés via LinkedIn. Pour les besoins de l’article, le questionnaire a également été distribué aux étudiants de M2 de la promotion LEA 2024-2025 de Nancy.

Le questionnaire se composait de sept questions, dont quatre à réponse ouverte. Les premières questions factuelles permettaient de savoir si les interviewés avaient suivi les cours de civilisation de L3 ou s’ils étaient partis en séjour Erasmus. La question 4 leur permettait de se remémorer leurs études et leurs cours de civilisation. Les questions 5 et 6 constituaient le cœur de l’enquête, elles portaient sur les compétences acquises et l’utilité des cours de civilisation dans la vie professionnelle. Enfin, la dernière question explorait la pertinence d’intégrer un cours de civilisation dans la maquette de Master, comme c’est le cas dans d’autres cursus LEA.

Avant de présenter ce retour « à hauteur d’étudiants », il convient de faire quelques remarques méthodologiques. Concernant la notion de “civilisation”, il a été décidé d’orienter d’emblée les personnes interrogées vers les cours de la maquette spécifiquement intitulés « Civilisation » (en L1 et L2), ainsi que le cours intitulé « Contexte socio-économique » (en L3), excluant a priori les contenus civilisationnels dispensés dans les cours de traduction ou de langue des affaires, ainsi que dans le cours consacré aux « Médias et actualités » en L3. Par ailleurs, le nombre de réponses obtenues qui s’élève à 19 (3 étudiants en M1, 10 étudiants en M2 et 6 anciens étudiants ayant fait leurs études à l’Université de Lorraine, sur les 60 contactés) ne constitue pas un panel représentatif.  Sur les six réponses obtenues de la part d’anciens étudiants, seules trois proviennent de personnes ayant fini leur Master il y a plusieurs années (en 2016 ou 2017) et non tout récemment, bénéficiant ainsi d’un vrai recul sur la valeur ajoutée de la civilisation dans leur vie professionnelle. Malgré les limites méthodologiques de cette enquête, il semble intéressant d’en analyser les résultats, qui semblent conforter la tendance qui se dégageait déjà des retours reçus spontanément, illustrant la plus-value de la civilisation en LEA, tant en termes de culture générale que de compétences transversales mobilisées, dans le monde professionnel.

Résultats des échanges informels et de l’enquête

Les retours spontanés des étudiants belges accueillis en double diplôme à Nancy en L3 (Double-Diplôme entre la licence LEA Anglais-Allemand et Anglais-Espagnol et la Licence « Business and Languages » de l’Université Karel de Grote – University of Applied Sciences and Arts, basé à Anvers en Belgique), recueillis en amont de l’enquête, sont éclairant. Les enseignements de langue sont très différents entre les deux universités : l’enseignement est uniquement linguistique à visée professionnelle à Anvers (avec des cours qui insistent sur la grammaire, le vocabulaire, la communication professionnelle). Les cours de civilisation et de traduction sont absents de leur maquette car ce n’est pas en lien avec la finalité de leur diplôme qui est orienté vers le management, la communication, le marketing. Ces étudiants belges expriment toutefois un intérêt marqué pour les cours de civilisation. Plusieurs soulignent qu’ils y trouvent l’occasion d’aller au-delà du seul apprentissage linguistique, en accédant à une compréhension plus riche des pays étudiés, de leur histoire, de leur culture politique et de leurs dynamiques économiques et sociales (développer des compétences autres que celles de l’apprentissage du vocabulaire et de la grammaire[51]). Ils affirment également que, comme l’accent est mis davantage sur le « contenu », ils « apprennent plus sur l’Allemagne » [52]. Ayant une visée plus professionnelle, le diplôme belge est prévu comme un bac +3 et ne se poursuit pas par un Master, toutefois, l’année de L3 à l’Université de Lorraine dans le cadre du double diplôme a donné l’envie à une des étudiantes belges de poursuivre ses études en Master LEA en France. Ces témoignages illustrent la spécificité de l’approche en filière LEA, où l’enseignement des langues ne se réduit pas à une compétence technique. En effet, si la formation LEA est comparée à d’autres formations commerciales ou de gestion, dans les IUT, les écoles de commerce ou les IAE, c’est la place privilégiée accordée à l’enseignement des civilisations étrangères qui fait une grande différence, « l’enseignement des langues se refusant en LEA à n’être qu’un outil de communication professionnelle », il s’inscrit dans une démarche de formation globale à l’interculturalité et à la compréhension du monde contemporain[53].

Concernant l’enquête, plusieurs compétences ont émergé des réponses aux questionnaires, classées ici du plus général au plus concret, et apparaissent liées aux pratiques de recherche ainsi qu’à la méthodologie mise en œuvre dans les cours et transmise aux étudiants en LEA à Nancy.

Une solide culture générale

La majorité des répondants évoquent un enrichissement intellectuel durable, la capacité à replacer des événements ou des faits dans leur contexte, et une meilleure compréhension des pays étudiés. Une étudiante en stage dans le secteur touristique mentionne, par exemple, le fait d’avoir pu contextualiser les monuments qu’elle présentait aux visiteurs grâce aux connaissances acquises en cours[54]. D’autres insistent sur leur capacité à « porter un regard juste » sur les sociétés avec lesquelles ils interagissent — une posture reliée à la démarche comparatiste et critique développée dans les enseignements[55].

Capacité d’adaptation et esprit d’analyse

Plusieurs témoignages soulignent l’apport des cours de civilisation en matière de compréhension du contexte socio-économique, d’analyse critique, de lecture de documents complexes. L’acquisition d’une rigueur méthodologique et d’une capacité d’analyse semblent favoriser l’adaptabilité dans des environnements multiculturels et professionnels variés[56].

Compétences de communication “extra-langagières”

La civilisation semble avoir aidé dans les interactions informelles ou interculturelles : savoir engager un échange en contexte, comprendre les références culturelles implicites, adopter un ton approprié dans une interaction interculturelle. Une étudiante mentionne qu’elle s’est sentie mieux préparée à un entretien avec un recruteur bavarois grâce aux repères culturels acquis en cours[57]. Cette capacité à interpréter les comportements, à anticiper les attentes culturelles, constitue un véritable atout dans le monde de l’entreprise[58].

Connaissances utiles au développement commercial

Certains anciens étudiants soulignent que leur connaissance du contexte culturel et institutionnel d’un pays leur permet aujourd’hui de mieux accompagner le développement international de leur entreprise. La civilisation, dans cette perspective, ne se limite pas à une compétence académique mais devient un levier[59].

Ces résultats vont dans le même sens que les retours informels des tuteurs de stage, qui saluent la capacité des étudiants à s’adapter rapidement, à faire preuve d’ouverture d’esprit et à mobiliser un ensemble de savoirs transversaux. Leur « profil culturel » est mis en avant en comparaison de stagiaires d’autres formations[60]. Ces étudiants maîtrisent tout un ensemble de savoirs et savoir-faire, ce qui facilite leur insertion sur un marché du travail international en perpétuelle évolution.

Il n’en demeure pas moins que les réponses ne sont pas systématiquement enthousiastes. Quelques étudiants indiquent ne pas avoir perçu de lien direct entre les cours de civilisation et leur expérience professionnelle[61], ou estiment que seul un séjour immersif à l’étranger a véritablement permis de comprendre la culture du pays en question[62]. Ces nuances ne remettent toutefois pas en cause la tendance générale qui se dégage de l’enquête : celle d’une valorisation de la civilisation dans le parcours des étudiants LEA, tant pour leur développement personnel que pour leur évolution professionnelle.

L’analyse des réponses à l’enquête et des retours d’expérience informels mettent en lumière le rôle important joué par la civilisation comme pilier d’une formation interdisciplinaire et intellectuellement exigeante. À l’instar du chercheur, l’étudiant en LEA est confronté à la pluralité des méthodologies, à la diversité des sources, à la complexité des enjeux sociétaux. C’est au fil des semestres qu’il apprend à maîtriser les outils de la recherche, à structurer une pensée critique, à croiser les savoirs. La civilisation, dans sa capacité à faire dialoguer les disciplines, à rendre intelligible la diversité des cultures, permet à l’étudiant de construire un socle de compétences transférables qui, sur le marché du travail, le distingue d’autres formations.

Conclusion

Cet article a mis en lumière l’évolution, les tensions et la portée de l’enseignement de la civilisation dans les filières LEA, à partir d’une approche croisée entre études anglophones et études germaniques, enrichie par une analyse de terrain mise en œuvre au sein de la filière LEA Anglais-Allemand de Nancy. Loin d’être un simple complément culturel ou un vestige des formations littéraires classiques, la civilisation apparaît comme un pilier structurant de l’enseignement en LEA. En articulant des savoirs historiques, politiques, économiques et culturels, elle permet aux étudiants de développer des compétences analytiques, interculturelles et comparatistes, directement mobilisables dans leur vie professionnelle puisqu’ils sont appelés à naviguer entre langues, systèmes économiques et références culturelles. Les témoignages des étudiants et diplômés recueillis révèlent un intérêt pour la civilisation. En assumant sa vocation interdisciplinaire, la civilisation en LEA ne se contente pas de transmettre des contenus : elle forme à une posture intellectuelle et professionnelle fondée sur la compréhension fine des sociétés, la contextualisation des discours et l’ouverture à l’altérité.

Les conclusions présentées dans cet article s’inscrivent dans le cadre spécifique du contexte nancéien. Au sein même de l’Université de Lorraine, l’enseignement de la civilisation n’a pas connu la même évolution durant les quinze dernières années entre la filière LEA Metz et celle de Nancy, bien que la civilisation ait récemment retrouvé une place centrale dans le cursus messin. La journée d’étude sur la place de l’enseignement de la civilisation organisée à l’Université de Rouen a également été l’occasion de mettre en lumière la singularité de la situation nancéienne, tant en ce qui concerne la position de la civilisation dans la maquette que la coopération établie entre enseignantes-chercheuses en études anglophones et en études germaniques. Afin de préciser davantage la place de la civilisation, il serait pertinent d’élargir cette enquête à d’autres universités et à d’autres couples de langues enseignés en LEA, auprès des enseignants-chercheurs et des étudiants. Néanmoins, une étude de plus grande envergure présenterait également certaines limites, notamment en raison du degré variable de collaboration entre enseignants selon les contextes institutionnels. Par ailleurs, les observations recueillies mettent en évidence une corrélation possible entre la perception d’une valeur ajoutée des cours de civilisation et les années d’expérience professionnelle des anciens étudiants. Une enquête plus approfondie, reposant notamment sur les réseaux d’anciens étudiants (alumni), permettrait de confirmer ou de nuancer cette hypothèse.

___

NOTES

[1] Voir entre autres : Pierre GUERLAIN, « Malaise dans la civilisation ? Les études américaines en France », Revue Française d’Etudes Américaines, n°83, Civilisation américaine : problématiques et questionnaires, janvier 2000, pp. 28-46. Gilles LEYDIER, Babel, La civilisation : objet, enjeux, méthodes, n°9, 2004, Université du Sud-Toulon-Var. Stephan MARTENS, « La civilisation allemande dans les études germaniques en France : ingénierie et atouts », Visions franco-allemandes, n°8, Juillet 2006, IFRI, p. 3. Hans-Jürgen LÜSEBRINK et Jérôme VAILLANT, dir., Civilisation allemande / Landes-Kulturwissenschaften Deutschlands. Bilan et perspectives dans l’enseignement et la recherche / Bilanz und Perspektiven in Lehre und Forschung, Villeneuve d’Ascq, Septentrion : 2013.

[2] Nathalie CARON et Caroline ROLLAND-DIAMOND, « Des sciences sociales en filière LLCER ou pourquoi le mot « civilisation » ne convient plus en études étrangères », The Conversation, 26 aout 2018, [https://theconversation.com/des-sciences-sociales-en-filiere-llcer-ou-pourquoi-le-mot-civilisation-ne-convient-plus-en-etudes-etrangeres-94061]. Vanessa BOULLET, « La civilisation économique : interdisciplinarité exemplaire ou limite de l’interdisciplinarité ? », Revue Française de Civilisation Britannique, XXIV-1, 2019, [https://doi-org.bases-doc.univ-lorraine.fr/10.4000/rfcb.2917].

[3] Serge, GOUAZÉ, « Quelle civilisation allemande pour quels étudiants ? », dans Hans-Jürgen LÜSEBRINK, Jérôme VAILLANT, op.cit., pp. 181-192.

[4] Camille MARTINERIE, « Pour un rééquilibrage Nord-Sud en études civilisationnelles : réflexion au prisme de la réception du postcolonialisme en France », FLAMME, n°2, Équilibre(s) en études civilisationnelles 2024, https://www.unilim.fr/flamme/1415

[5] Jean-Frédéric SCHAUB, « La civilisation de l’hispanisme français », HispanismeS, n°23, 2024, [http://journals.openedition.org.bases-doc.univ-lorraine.fr/hispanismes/20328].

[6] Hans-Jürgen LÜSEBRINK, et Jérôme VAILLANT, op.cit.

[7] Stephan MARTENS, « La civilisation allemande dans les études germaniques en France », op.cit., p. 3.

[8] Pour une comparaison entre la civilisation en tant que champ disciplinaire et les studies héritées des formations anglophones, voir Vanessa BOULLET, op. cit.

[9]  Voir l’article plaidoyer de Nathalie CARON et Caroline ROLLAND-DIAMOND, op. cit.

[10] Romain GARBAYE et Gilles LEYDIER, « Civilisation et interdisciplinarité : Un entretien avec Jean-Paul Revauger », Revue Française de Civilisation Britannique, XXIV-1, 2019, p. 4.

[11] Stephan MARTENS, « Décloisonnement académique et études européennes. Vers une dimension renouvelée de l’enseignement et de la recherche en civilisation allemande contemporaine » dans Hans-Jürgen LÜSEBRINK, Jérôme VAILLANT, op. cit. p. 40.

[12] Dans ce texte, les appellations au masculin générique désignent des personnes indépendamment de leur genre.

[13]  Jacques GRANDJONC, « Quelques réflexions sur ce que les germanistes français nomment « Civilisation allemande » », Allemagnes d’aujourd’hui, n°104, avril-juin 1988, p. 106, [https://doi.org/10.3406/alauj.1988.3511].

[14] Hans Manfred BOCK, « Henri Lichtenberger, père fondateur de la germanistique française et médiateur entre la France et l’Allemagne » dans Michel ESPAGNE et Michael WERNER, dir., Les études germaniques en France (1900-1970), Paris : CNRS Editions, 1994, pp. 155-169, ici p. 161.

[15] Pascale GRUSON, « Edmond Vermeil (1878-1964) » dans Michel ESPAGNE et Michael WERNER, op. cit., p. 176.

[16] Stephan MARTENS, « Décloisonnement académique et études européennes » op. cit., pp. 39-40.

[17] Ibid.

[18] Ulrich PFEIL, « Deutsche Zeitgeschichte und civilisation allemande : Möglichkeiten und Grenzen eines regard croisé », dans Hans-Jürgen LÜSEBRINK, Jérôme VAILLANT, op. cit., pp. 105-106.  Chryssoula, KAMBAS, « La famille Bertaux », dans Michel ESPAGNE et Michael WERNER, op. cit., pp. 207-209.

[19] Gilles LEYDIER, « Introduction: the Jack of all trades, the master of one », dans Gilles LEYDIER, op. cit., p. 11.

[20] INSTITUT DES AMÉRIQUES, Les Etudes sur les Amériques en France, Livre blanc du GIS, janvier 2017, p. 14.

[21] Gilles LEYDIER, « Introduction: the Jack of all trades, the master of one », op. cit. p.11 ; Camille MARTINERIE, op. cit., p. 24 ; Bernard D’HELLENCOURT, « In Memoriam Monica Charlot (1933-2005) », in Etudes anglaises, 2005/2, tome 58, pp. 255-256.

[22] Nicolas WEILL, « Monica Charlot, pionnière des études de civilisation britannique », Le Monde, 26.05.2005, https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2005/05/26/monica-charlot-pionniere-des-etudes-de-civilisation-britannique_654279_3382.html.

[23] Suzy HALIMI, « Esquisse biographique de Monica Charlot », in Suzy HALIMI, Les institutions politiques au Royaume-Uni : Hommage à Monica Charlot, Paris : Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2006, pp. 15-19.

[24] Romain GARBAYE et Gilles LEYDIER, op. cit. ; d’autres collègues datent l’entrée de la civilisation comme option de l’agrégation en 1976, voir Nathalie CARON et Caroline ROLLAND-DIAMOND, op. cit., Marie-Pierre POULY, « Analystes et analyses de la curiosité américaniste des anglicistes en France », Nuevo Mundo Nuevos Mundos, 2010, https://doi-org.bases-doc.univ-lorraine.fr/10.4000/nuevomundo.58502

[25] INSTITUT DES AMÉRIQUES, op. cit., p. 14.

[26] Nathalie CARON et Caroline ROLLAND-DIAMOND, op. cit.

[27] Markus BODLER, « Les historiens français et les États-Unis dans les années 1950 et 1960 », in Nuevo Mundo Mundos Nuevos, janvier 2010, [https://journals.openedition.org/nuevomundo/58811].

[28]  Marie-Pierre POULY, op. cit.

[29] Voir par exemple la position de Nathalie CARON et Caroline ROLLAND-DIAMOND, op. cit.

[30] Gilles LEYDIER, « Penser la civilisation contemporaine en LEA », op. cit., p. 133.

[31] Ibid. Ulrich PFEIL, op. cit., p.116.

[32] Nathalie CARON et Caroline ROLLAND-DIAMOND, op. cit.

[33] Entretien du 11.04.2025 avec Amy WELLS, dans le cadre de son habilitation à diriger des recherches portant sur « Les espaces des pouvoirs féminins américains des XXe et XXIe siècles ».

[34] Andrew ROSSITER, “Applied Modern Languages in France: Historical Insights and Disciplinary Challenges”, Asp,  n°87, 2025, [http://journals.openedition.org.bases-doc.univ-lorraine.fr/asp/9484].

[35] Gilles LEYDIER, « Penser la civilisation contemporaine en LEA », op. cit., p. 134 ; Stephan MARTENS, « La civilisation allemande dans les études germaniques en France : ingénierie et atouts », op.cit., p. 7.

[36] Stephan MARTENS, « La civilisation allemande dans les études germaniques en France », op. cit., pp. 6-8 ; Gilles LEYDIER, « Penser la civilisation contemporaine en LEA », op. cit., p. 136.

[37] Daniel TOUDIC : « La spécificité du LEA », dans Renée DICKASON, dir., Enseigner la civilisation des pays anglophones : définitions, méthodes, expériences, Rennes : Presses Universitaires de Rennes, 1998, p. 253

[38] Stephan MARTENS, « La civilisation allemande dans les études germaniques en France », op. cit.

[39] Daniel TOUDIC, op. cit., p. 253, Gilles LEYDIER, « Penser la civilisation contemporaine en LEA », op. cit., p. 134.

[40] Stephan MARTENS, « La civilisation allemande dans les études germaniques en France », op. cit., p. 10.

[41] INSTITUT DES AMÉRIQUES, op. cit., p. 76 et Ulrich PFEIL, op. cit., p. 106.

[42] Pierre GUERLAIN, op. cit.

[43] Mathilde GAILLARD et Caroline PEYNAUD, « Spécialiser la LEA ? De l’intérêt de l’étude des discours, milieux et cultures spécialisés pour concevoir les enseignements en Langues étrangères appliquées », ASp, n° 81, 2022, (http://journals.openedition.org.bases-doc.univ-lorraine.fr/asp/7749].

[44] Voir Gilles LEYDIER, « Penser la civilisation contemporaine en LEA », op. cit.. C’est aussi ce que sous-entend l’appel à communications de la journée d’étude de l’Université de Rouen Normandie sur la civilisation en LEA à l’origine de ce projet, consultable : [https://eriac.univ-rouen.fr/quelle-place-pour-lenseignement-de-la-civilisation-dans-la-filiere-lea/].

[45]  cf. La fiche RNCP pour LEA indique : « Bloc de compétences n° 2: Identification d’un questionnement au sein d’un champ disciplinaire. Compétences : Comprendre les faits de civilisation qui ont marqué l’évolution des pays des langues maitrisées. Connaître, reconnaitre et comprendre les idiosyncrasies culturelles qui marquent les sociétés. Posséder une bonne connaissance des faits de civilisation, notamment socio-économique, des pays des langues étudiées. Comprendre, et réagir en conséquence, à des comportements, des sensibilités et des modes de pensée ; une autre culture dans des situations de communication ; organisation ou de décision », consultable sur [https://api.optionmetier.fr/referentiels/fiches-rncp/RNCP25169/].

[46] Gilles LEYDIER, « Penser la civilisation contemporaine en LEA », op. cit., p. 136.

[47] Ibid.

[48] Ibid.

[49] Voir une enquête de la Chambre de commerce et de l’industrie allemande : Deutscher Industrie- und Handelskammertag, Kompetent und praxisnah –  Erwartungen der Wirtschaft an Hochschulabsolventen, Druck Center Meckenheim, 2015, p. 10 et p. 17.

[50] Vincent LATOUR, « De l’interdisciplinarité et du comparatisme en civilisation britannique », Revue Française de Civilisation Britannique, XXIV-1, 2019, [https://journals.openedition.org/rfcb/2857].

[51] Echange IS. Les échanges informels et les questionnaires remplis par les étudiants et anciens étudiants ont été anonymisés. Pour respecter l’anonymat, chaque questionnaire et échange est référencé par deux lettres.

[52] Echange AV.

[53] Serge GOUAZÉ, op.cit., p. 182.

[54] Questionnaire CB.

[55] Questionnaires LF, ER, AC, JP, MM, PS.

[56] Questionnaires AE, JK, AC.

[57] Questionnaire JP.

[58] Questionnaires JK, AC, ML, PS.

[59] Questionnaires AC et JP.

[60] Echanges LR.

[61] Questionnaires CG et HE.

[62] Questionnaire AF.

___

Date de réception de l’article : 11 avril 2025

Date d’acceptation de l’article : 6 juin 2025

Mise en ligne : 9 décembre 2025

Bibliographie

BOCK, Hans Manfred, « Henri Lichtenberger, père fondateur de la germanistique française et médiateur entre la France et l’Allemagne » dans Michel Espagne et Michael Werner, dir., Les études germaniques en France (1900-1970), Paris : CNRS Editions, 1994, pp. 155-169.

BODLER, Markus, « Les historiens français et les Etats-Unis dans les années 1950 et 1960 », Nuevo Mundo Mundos Nuevos, janvier 2010, [https://journals.openedition.org/nuevomundo/58811].

BOULLET, Vanessa, « La civilisation économique : interdisciplinarité exemplaire ou limite de l’interdisciplinarité ? », Revue Française de Civilisation Britannique, XXIV-1, 2019, [https://journals-openedition-org.bases-doc.univ-lorraine.fr/rfcb/2917].

CARON, Nathalie et Caroline ROLLAND-DIAMOND, « Des sciences sociales en filière LLCER ou pourquoi le mot « civilisation » ne convient plus en études étrangères », The Conversation, 26 août 2018, [https://theconversation.com/des-sciences-sociales-en-filiere-llcer-ou-pourquoi-le-mot-civilisation-ne-convient-plus-en-etudes-etrangeres-94061].

Chambre du commerce et de l’industrie allemande : Deutscher Industrie- und Handelskammertag, Kompetent und praxisnah –  Erwartungen der Wirtschaft an Hochschulabsolventen, Druck Center Meckenheim, 2015.

D’HELLENCOURT, Bernard, « In Memoriam Monica Charlot (1933-2005) », Etudes anglaises, 2005/2, tome 58, pp. 255-256.

ESPAGNE Michel et Michael WERNER, dir., Les études germaniques en France (1900-1970), Paris, CNRS Editions : 1994.

GAILLARD, Mathilde et Caroline PEYNAUD, « Spécialiser la LEA ? De l’intérêt de l’étude des discours, milieux et cultures spécialisés pour concevoir les enseignements en Langues étrangères appliquées », ASp, n° 81, 2022, [http://journals.openedition.org.bases-doc.univ-lorraine.fr/asp/7749].

GARBAYE, Romain et Gilles LEYDIER, « Civilisation et interdisciplinarité : Un entretien avec Jean-Paul Revauger », Revue Française de Civilisation Britannique, XXIV-1, 2019, [http://journals.openedition.org.bases-doc.univ-lorraine.fr/rfcb/2982].

GOUAZÉ, Serge, « Quelle civilisation allemande pour quels étudiants ? », dans Hans-Jürgen LÜSEBRINK, Jérôme VAILLANT, dir., Civilisation allemande / Landes-Kulturwissenschaften Deutschlands. Bilan et perspectives dans l’enseignement et la recherche / Bilanz und Perspektiven in Lehre und Forschung, Villeneuve d’Ascq, Septentrion : 2013, pp. 181-192.

GRANDJONC, Jacques, « Quelques réflexions sur ce que les germanistes français nomment « Civilisation allemande » », Allemagnes d’aujourd’hui, n°104, avril-juin 1988, pp. 104-120.

GRUSON, Pascale, « Edmond Vermeil (1878-1964) » dans Michel ESPAGNE et Michael WERNER, dir., Les études germaniques en France (1900-1970), Paris, CNRS Editions : 1994, pp. 171-193.

GUERLAIN, Pierre, « Malaise dans la civilisation ? Les études américaines en France », Revue Française d’Etudes Américaines, n°83, Civilisation américaine : problématiques et questionnaires, janvier 2000, pp. 28-46, [https://doi.org/10.3406/rfea.2000.1792].

HALIMI, Suzy, « Esquisse biographie de Monica Charlot », in Suzy HALIMI, Les institutions politiques au Royaume-Uni : Hommage à Monica Charlot, pp. 15-19.

INSTITUT DES AMERIQUES, Les Etudes sur les Amériques en France, Livre blanc du GIS, janvier 2017.

KAMBAS, Chryssoula, « La famille Bertaux », dans Michel ESPAGNE et Michael WERNER, dir., Les études germaniques en France (1900-1970), Paris, CNRS Editions : 1994, pp. 205-222.

LATOUR, Vincent, « De l’interdisciplinarité et du comparatisme en civilisation britannique », Revue Française de Civilisation Britannique, XXIV-1, 2019, [https://journals.openedition.org/rfcb/2857].

LEYDIER, Gilles, Babel, La civilisation : objet, enjeux, méthodes, n°9, 2004, Université du Sud-Toulon-Var.

LEYDIER Gilles, « Penser la civilisation contemporaine en LEA », dans Gilles LEYDIER, dir., Babel, La civilisation : objet, enjeux, méthodes, n°9, 2004, Université du Sud-Toulon-Var, pp. 133-148.

LEYDIER, Gilles, « Introduction : the Jack of all trades, the master of one », dans Gilles LEYDIER, dir., Babel, La civilisation : objet, enjeux, méthodes, n°9, 2004, Université du Sud-Toulon-Var, pp. 7-20.

LÜSEBRINK, Hans-Jürgen et Jérôme VAILLANT, dir., Civilisation allemande / Landes-Kulturwissenschaften Deutschlands. Bilan et perspectives dans l’enseignement et la recherche / Bilanz und Perspektiven in Lehre und Forschung, Villeneuve d’Ascq : Septentrion, 2013.

MARTENS, Stephan, « La civilisation allemande dans les études germaniques en France : ingénierie et atouts », Visions franco-allemandes, n°8, Juillet 2006, IFRI.

MARTENS, Stephan, « Décloisonnement académique et études européennes. Vers une dimension renouvelée de l’enseignement et de la recherche en civilisation allemande contemporaine » dans Hans-Jürgen LÜSEBRINK, Jérôme VAILLANT, dir., Civilisation allemande / Landes-Kulturwissenschaften Deutschlands. Bilan et perspectives dans l’enseignement et la recherche / Bilanz und Perspektiven in Lehre und Forschung, Villeneuve d’Ascq, Septentrion : 2013, pp. 39-50.

MARTINERIE, Camille, « Pour un rééquilibrage Nord-Sud en études civilisationnelles : réflexion au prisme de la réception du postcolonialisme en France », FLAMME, n°2, Équilibre(s) en études civilisationnelles 2024, DOI : [10.25965/flamme.1415].

PFEIL, Ulrich, « Deutsche Zeitgeschichte und civilisation allemande : Möglichkeiten und Grenzen eines regard croisé », dans Hans-Jürgen LÜSEBRINK, Jérôme VAILLANT, dir., Civilisation allemande / Landes-Kulturwissenschaften Deutschlands. Bilan et perspectives dans l’enseignement et la recherche / Bilanz und Perspektiven in Lehre und Forschung, Villeneuve d’Ascq, Septentrion : 2013, pp. 103-125.

POULY, Marie-Pierre, « Analystes et analyses de la curiosité américaniste des anglicistes en France », Nuevo Mundo Nuevos Mundos, 2010, [https://doi-org.bases-doc.univ-lorraine.fr/10.4000/nuevomundo.58502].

ROSSITER, Andrew, “Applied Modern Languages in France: Historical Insights and Disciplinary Challenges”, ASp, n°87, 2025, [http://journals.openedition.org.bases-doc.univ-lorraine.fr/asp/9484].

SCHAUB, Jean-Frédéric, « La civilisation de l’hispanisme français », HispanismeS, n°23, 2024, [http://journals.openedition.org.bases-doc.univ-lorraine.fr/hispanismes/20328].

TOUDIC, Daniel, « La spécificité du LEA », dans : Renée DICKASON, dir., Enseigner la civilisation des pays anglophones : définitions, méthodes, expériences, Rennes : Presses Universitaires de Rennes, 1998.

WEILL, Nicolas, « Monica Charlot, pionnière des études de civilisation britannique », Le Monde, 26.05.2005, [https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2005/05/26/monica-charlot-pionniere-des-etudes-de-civilisation-britannique_654279_3382.html].

Auteurs

Vanessa BOULLET

Université de Lorraine, IDEA

Numéro Orcid : 0000-0002-1832-6506

vanessa.boullet@univ-lorraine.fr

 

Myriam RENAUDOT

Université de Lorraine, CERCLE

myriam.benaudot@univ-lorraine.fr

 

Références

Pour citer cet article :

Myriam RENAUDOTVanessa BOULLET - "Myriam RENAUDOT et Vanessa BOULLET, Valeur ajoutée de la civilisation en LEA : regards croisés" RILEA | 2025, mis en ligne le 05/12/2025. URL : https://anlea.org/revues_rilea/myriam-renaudot-et-vanessa-boullet-valeur-ajoutee-de-la-civilisation-en-lea-regards-croises/